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2 avril 2012 1 02 /04 /avril /2012 18:18

J'ai loupé le coche - pas tout-à-fait de ma faute, d'ailleurs, chez les Scryfouillards qui dimanche en huit proposaient un atelier écriture. J'ai loupé le coche, mais depuis j'ai des regrets. D'abord parce que les ateliers du scryf sont bien plus largement ouverts, comprennent moins de règles à la con, que beaucoup d'autres. Ensuite parce que le challenge réside aussi dans la rapidité... Mais justement, c'est ce délai trop court qui m'a handicapée. Pourtant, depuis, j'ai le regret persistant de ne pas avoir participé à l'atelier "en bateau" et "oh, la belle bleue !", à cause d'une de ces mauvaises petites idées qui me font divaguer. Tant pis, je m'en vais l'écrire ici même, ma petite idée, avant d'aller embêter les participants du scryf avec mes hors-délai...

zou ! 

 

BERCE JUSQU'AU FOND DU COEUR

 

Je me souviens encore  des premiers mots qu'il a prononcés à mon sujet : "Oh, qu'elle est belle, oh,  la belle bleue," s'est-il exclamé naïvement, pendant que son tuteur, un Mentor qui n'était pas encore vieux,  l'empêchait de courir sur la plage.  C'était absolument vrai : j'étais ce jour là, belle, et plus que belle, et bleue, plus que bleue.  Le petit homme qui  s'exclamait ainsi,  comme s'il me voyait pour la première fois alors que de tout temps, j'avais bercé son île natale de mes bras blancs, ne devait  pas avoir plus de quatre ans, certainement pas cinq en tout cas. Quel bel enfant c'était !  Droit et si fier, la main posée sur un tronc d'olivier, des boucles dorées  se détachant sur sa peau bronzée  et dardant son regard, bleu et vert et déjà intense, vers la plage blonde, et vers moi...  Mais il lui fallait rentrer au Palais, et il m'a regardée une dernière fois avec regret, avant d'obéir à son précepteur. 

Ah, je n'ai jamais oublié cette première fois. Maintenant  j'ai vieilli, et  vous les hommes, à force de vous multiplier sur mes rives, de me parcourir sans cesse et de fond en comble, de me jeter vos ordures à la face et de me racler de vos filets, m'avait prématurément vieillie, et salie... Mais à cette époque-là j'étais  d'une beauté étourdissante. Mais cet enfant, cela l'a pris si jeune, et il était si beau - j'ai tout de suite su qu'il y allait avoir, entre lui et moi, une de ses amours  qui font trembler l'univers. Je crois même, que, chez les hommes, un vieux poète a écrit notre histoire, à cet homme-là, et à moi. Je ne sais pas ce qu'il a dit, parce que je ne parle pas le langage des hommes... Sauf des rares qui sont devenus à jamais mes amants. Comme celui-là. 

Evidemment, il a passé son enfance à me courtiser. Pas de jour sans qu'il veuille me prendre, qu'il cabotine le long des côtes de son île, et à chaque fois, il voulait aller plus loin. Tous mes amants, sans exception, n'ont pu se contenter de mes plages et de mes côtes. Tous, sous des prétextes divers, l'exploration, le loisir, même la guerre, ont voulu connaître tous mes visages. Cet amant-là s'est embarqué dès qu'il l'a pu, et j'ai cru, oui j'ai cru que j'arriverais à le retenir... 

Il a si longtemps joué avec moi. IL était de première force, évidemment, dans l'art de la navigation, et je me faisais douce sous son gouvernail. Comme je l'ai aimé ! Il était à moi : il mentait aux autres, à son épouse, à ses guerriers, à ses alliés, invoquant d'invraisemblables aventures pour rester avec moi... J'étais seule à le connaître vraiment - du moins je le croyais. Car cet homme si indissolublement attaché à mes flots,à mes secrets et à mes merveilles, me trompait pourtant. Je croyais être seule dans son coeur - mais un soir, un beau soir où, paisiblement, je le berçais, j'ai vu qu'il pensait à une autre. Non, pas à une de ces femmes méprisables qui avaient beau se coire magiciennes ou déesses - alors qu'elles étaient aussi périssables que la moindre de mes sardines - mais à sa terre. Oui, ce bout de caillou que j'encerclais, que j'isolais, cette terre sèche et caillouteuse, ces quatres champs et ces trois villages : c'étaient eux qui lui manquaient, c'était pour eux qu'il me trahissait... Ah, ça, je vous prie de croire qu'il l'a payée cher, sa trahison, lui, cet homme "aux mille tours" qui avait su me séduire. Je l'ai secoué, épouvanté, tiré vers des gouffres, je me suis jouée de lui, à mon tour, comme d'un pantin, et quand je l'ai laissé enfin rejoindre sa Pénélope, et cette Ithaque que j'avais appris à haïr, les beaux cheveux drus d'Ulysse étaient tombés, sa peau était burinée et gardait la trace de mes doigts, et ses yeux bleu-vert ne s'ouvraient plus qu'à travers les fentes de la ruse. 

Voyez-vous, ce n'était que justice. Il était, c'est vrai, un des plus beaux amants que j'ai jamais eus, moi, la Méditerranée. Et je l'ai bercé, cet Ulysse si beau, jusqu'au fond de mon coeur... Mais c'est ainsi :  je n'ai jamais supportée qu'on me mène en bateau... "

 

 

 

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27 mars 2012 2 27 /03 /mars /2012 10:51

Toujours dans la série "Les copains d'abord", je voudrais vous présenter une nouvelle-née : une revue d'histoire populaire rouennaise, dont le premier numéro sur "la Révolution de 1848 à Rouen et dans ses environs" est passionnant. 

Ce sont des copains politisés, syndicalistes et autres, qui ont monté l'association loi de 1901 "Mémoires du Mouvement Ouvrier". Le  but est de retrouver et d'utiliser toutes les archives du mouvement ouvrier dans ses luttes, partis, syndicats et associations. Un devoir de mémoire, en quelque sorte. 

Ils n'ont pas (encore) de site internet, mais le travail réalisé étant tout à fait remarquable, cela ne saurait tarder. En tout cas, la pertinence du point de vue permet de faire revivre une mémoire spécifique, qui était "recouverte" jusque là, puisque ceux qui la faisaient, cette histoire des grèves et des mouvements sociaux, n'étaient pas ceux qui en rendaient compte, la parole étant l'apanage de la bourgeoisie de l'époque (Flaubert assistant au Banquet Républicain de Noël 1847, à côté de 1800 électeurs censitaires). 

Nul doute que ce cahier historique, rigoureux et éclairé, dont la qualité étonne venant d'amateurs (mais il est vrai que les potes ont plus de loisirs vu qu'ils abordent aux rivages de la retraite, tempus fugit !)  ne soit le premier d'une longue série. Vous pouvez le commander près de l'association "mémoires du mouvement ouvrier", mmo76@laposte.net, ou MMO, 21, rue des Epis, 76300 SOTTEVILLE LES ROUEN. IL vous en coûtera 3 euros, mais franchement, on a envie de donner plus pour que cela continue.

L'association est ouverte à tous ceux que la connaissance du mouvement ouvrier rouennais intéresse, et les copains sont à la recherche de toute documentation, affiches, tracts, courriers, témoignages... Qu'on se le dise ! 

 

Et, pour vous appâter, voici un extrait : 

 

"(après la loi du 22 mars 1841)... Et à l'usine tout est fait pour ne pas laisser place à la distraction. Dans son roman très documenté, Le Roman des Ouvrières, Amélie Bosquet peut noter que l'on place les fenêtres en hauteur dans les ateliers, afin que personne ne puisse regarder dehors. "Cette précaution est plus rigoureusement prise encore dans les ateliers destinés aux femmes, comme les tissages. Pour qu'une femme travaille bien, dit-on, il faut qu'elle ne puisse apercevoir ni une fleur, ni un oiseau. "

 

 

 

 

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22 mars 2012 4 22 /03 /mars /2012 09:42

Mathurin Régnier est mort à Rouen en 1613. Tout chez ce type m'attire, ses satires, sa rebellion contre un avenir qui lui était tracé d'avance, jusqu'à sa fin (débauches, alcoolisme et tripots divers) due à l'incompréhension de son temps, qui préférait le sage Malherbe...

J'ai eu l'impression, en feuilletant quelques unes de ses satires, de "rencontrer quelqu'un"


. Et après tout, est-ce si différent de croiser un auteur mort depuis cinq cent ans, mais dont la plume reste incisive après tout ce temps, et de "tchater" avec les inconnu(e)s du Net, hors d'atteinte non par la mort, mais par l'écran qui s'interpose ? 

 

J'aime donc Mathurin Régnier, et il me paraît si romanesque que je gage qu'une biographie romancée a dû être élaborée sur lui. Je m'en vais chercher sur Google, tiens, et la prochaine fois que j'irai à Rouen, je tâcherai de savoir où est la tombe d'un si remarquable personnage :

 

"« J’ai vescu sans nul pensement,

     Me laissant aller doucement

A la bonne loy naturelle,
Et si m’estonne fort pourquoi
La mort osa songer à moi
Qui ne songeay jamais à elle. »

 

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18 mars 2012 7 18 /03 /mars /2012 10:59

... J'en étais là de mes déambulations au Salon du Livre, et puis, d'un coup, j'ai commencé à m'amuser. L'instant d'avant, je déplorais l'injustice qui se manifestait là : d'un côté, des files d'attente devant les auteurs célèbres. De l'autre, sur de petits stands modestes, quelques auteurs esseulés qui suivaient longuement les passants du regard... Je me suis toujours sentie coupable quand on me regarde ainsi, à cause de la SPA et des animaux que l'on voudrait tous délivrer de leurs cages, alors qu'on sait bien qu'on ne pourra jamais n'en sauver que fort peu. Bon, il est peut-être un peu exagéré d'associer le regard des écrivains méconnus au désarroi des bêtes abandonnées, je vous l'accorde. Mais la souche est la même : regretter de ne pouvoir ni faire le bonheur des uns, ni lire (tous)  les livres des autres ! 

Et puis j'ai entendu un auteur qui vantait à une belle passante, effarouchée et alléchée à la fois, les mérites de son livre. La voix basse, et sans la quitter des yeux, il lui expliquait que l'ouvrage -  où il se dévoilait pleinement  - n'avait rien de pornographique, n'est-ce pas. C'était juste une sorte de "plaidoyer pour l'auto-érotisme" (je cite, hein) et ses joies solitaires, qui pouvait à l'envi profiter à tous et toutes, surtout toutes.... Un tout petit degré de plus à ce vice impuni, et assez onaniste il est vrai, qu'est la lecture, en quelque sorte... Je ne pus m'empêcher de jeter, en passant, qu'on pouvait en plus le lire d'une main, ce sacré bouquin non pornographique, ce qui est bien pratique pour faire d'autres choses, et puis je me suis enfuie en riant sous cape, pendant que l'auteur, du coup, m'appelait à pleine voix, tendant vers moi l'objet en question et me suppliant de l'acheter. 

J'en riais encore en arrivant à un des plus somptueux stands du salon : "trésors de livres", où des reproductions d'enluminures "à l'ancienne", qui ne m'intéressaient pas vraiment, côtoyaient un vrai trésor, celui-là : les manuscrits d'écrivains- cinéastes. L'écriture de Pagnol lui ressemblait tellement ! Vive, élancée, sans ratures et courant d'un bout à l'autre de la page, elle conservait cependant quelque chose de l'application scolaire, dans la perfection des boucles des f et des g...

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Celle de Giono m'impressionna une nouvelle fois et puis il décrivait, dans une simple lettre,  le village d'Aubignagne comme un "renard étranglé au collet", et l'admiration me transperçait.

 

 

 

Mais c'est Cocteau images-8.jpeg

 

 

 

 

 

 

 

qui m'a le plus amusée. Répondant aux critiques sur le film "la Belle et la Bête", et voulant montrer son détachement, il commence une phrase en disant que les critiques "ne l'ont pas..." et puis il se met à barrer furieusement 4 participes passés, pas moins, avant de trouver le distancié "choqué". Et ces ratures disent si exactement ce que Cocteau prétend démentir... J'ai recopié soigneusement la formule d'une de ces lettres "cinématographiques", où Cocteau, de sa petite écriture soigneuse et rapide, définit le cinéma comme "encre de lumière, avec laquelle (il) a le droit d'écrire ce qu'il veut."

Et puis je m'en fus dédicacer mon exemplaire d'"autodictionnaire Proust" . Je tremblais un peu en m'approchant, mais en fait, il n'y avait certes pas de quoi. Pierre Assouline ressemble tellement...  à Pierre Assouline que c'en est hallucinant. IL a vraiment la voix douce, la réserve bienveillante, le bon sourire et l'emploi du temps fourni, qu'on lui imagine. Il décèle aussi, instantanément, si le livre qu'on lui tend a été lu, (ce qui était mon cas),  ou non...  Ce fut vite expédié. Le temps pourtant, dans la file d'attente, de croiser une autre intervenaute, que je ne nommerai pas ahaha, mais dont la  rencontre  me fut réconfortante : comme à chaque fois que je suis émue, j'ai eu besoin de masquer cette émotion en racontant n'importe quoi, très vite, un peu comme un chien qui veut se faire adopter montre à quelle vitesse il peut donner la patte ! Et la bienveillance de X m'a vraiment fait du bien : qu'elle en soit ici remerciée. 

Une fois ceci fait, ouf, j'y étais arrivée, c'est bien Clopine, tu es une grande fille maintenant tu vois, il me restait encore un peu de temps pour le reste du Salon. Je me souvins de la commande de Rose, et j'allai flâner autour du stand du Japon. 

J'ai un problème avec le Japon. Si certains films de Kurosawa, comme "Rêves", avec son épisode prémonitoire "le Mont Fuji en rouge" qui décrit une catastrophe naturelle dégénérant en apocalypse nucléaire, me parlent vraiment (je me souviens aussi du sublime "Voyage à Tokyo" d'Ozu... ), la littérature, en revanche... Je n'aime pas le bellicisme de Mishima, ni surtout son suicide. Je trouve le "Kafka sur le rivage" de Murakami assez niaiseux. Je déteste l'esthétique des mangas, et n'apprécie pas du tout l'oeuvre de Miyazaki. Le Japon, avec ses codes, ses étiquettes pointilleuses, son hypocrisie aussi, et les accablements de sa destinée, m'inspire en fait une légère répugnance, voilà, je l'avoue, malgré les cloisons translucides, les bambous et la spiritualité de ses jardins. 

Aussi ai-je cherché dans ce stand, accrochés au  longs tasseaux qui voulaient rappeler les bambous, des photos parlant de Fukushima, des images d'un Japon bouleversé et tremblant. En vain. Il n'y avait là, autour des sages piles de livres, que du Japon léché et policé, portraits d'auteurs souriants et paisibles, inévitables cerisiers... 

Pourtant, quand une japonaise au long visage, qui faisait office d'interprète, recruta quatre volontaires pour participer à la "cérémonie du thé", j'avançais . Cette femme avait un visage doux et éclairé de grands yeux, elle me regardait attentivement en m'installant sur l'estrade où j'allais participer à la "cérémonie". Le temps d'avoir une petite angoisse (il fallait se déchausser, et j'eus peur un instant qu'un petit trou dans mon collant n'ait provoqué une superbe échelle...) j'étais installée en face d'un splendide kamemono revêtu d'une inscription bien évidemment incompréhensible, de petits objets de bambous et... d'une splendide cafetière électrique, qui plombait un peu l'ambiance ! (mais le moyen d'avoir des pierres chauffées à blanc et dégageant une fumée d'encens choisi, sans voir la sécurité s'affoler ?)  

L'officiante arriva, parée comme il se doit, kimono et zori, sourire et déconcertante courtoisie. Tout ici, codifié à l'extrême et au-delà, voulait signifier la spiritualité des gestes. Il s'agissait d'offrande, de partage, de bienveillance et de sérénité, tentait-on de nous faire sentir. Je le comprenais parfaitement, même si j'avais bien évidemment du mal à me mettre en phase. Je n'avais dans la bouche que le goût d'un minuscule gâteau un peu dur et collant au dents, puis, servi dans un bol qui ressemblait curieusement à ce que Clopinou  avait jadis  confectionné pour moi  à la fête des mères,  en moyenne section de maternelle, un thé vert dont la saveur un peu âcre me renvoyait à la soupe à l'oseille... Néanmoins, je voulais me persuader que mes sensations imparfaites ne provenaient que de mon obtuse personne, et non de la gracieuse officiante. Je m'en voulais, mais je ne pouvais m'empêcher de me demander ce qui la motivait, elle,  à ainsi venir tenter de spiritualiser un ancien rite, alors même que les conditions matérielles - les deux caméras qui filmaient le tout, la foule qui se pressait, les interruptions des uns qui venaient renifler la senteur du thé et des autres qui ne pouvaient s'empêcher d'entretenir l'interprète de leur récent voyage au Japon, et  mon impuissance manifeste  à me mettre au diapason, jusqu'aux micros qu'il lui fallait tenir - tout rendait l'entreprise pratiquement impossible. Pourtant je tins bon jusqu'au bout, et m'attirai même les faveurs de mes hôtesses, en retirant mon chapeau quand on me présenta ma tasse de thé et en m'inclinant respectueusement. Hélas, j'étais en même temps en train de me demander si l'officiante était une ancienne geisha, et si elle participait au Salon,  comme, chez nous, les anciens yéyés passés de mode animent les foires aux jambons dans les supermarchés. Je suis une mécréante, que voulez-vous. 

Nous échangeâmes cependant nos adresses, Madame Geisha et moi (je lui avais manifestement plu), et nous fîmes même intervenir deux ou trois interprètes supplémentaires  pour traduire "pays de Bray",  qui restait obscur à la Dame au long visage. Bon, je peux désormais fréquenter un salon de thé de  la banlieue de Tokyo, si j'y vais un jour...

Mais je me suis surtout bien amusée, beaucoup plus que je n'aurais jamais cru pouvoir le faire dans un endroit pareil. J'ai acheté quelques livres, minuscules gouttes de mots dans l'océan bruissant des exposants, et surtout, et j'en riais en sortant de là,  je suis  restée  impertubablement fidèle à moi-même :  j'avais solidifé cette après-midi au Salon du Livre de cette manière-là...

Eh oui ! Désormais, quand j'y repenserai, c 'est tout ce  Salon du livre qui allait ressurgir, dans sa forme et sa solidité, dans son brouhaha et ses oasis, dans le sourire des animateurs et le piétinement de la foule, d'une... tasse de thé... 

 

 

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15 mars 2012 4 15 /03 /mars /2012 07:45

Je m'en doutais, Clopin a remis ça hier - je suis chargée de l'écriture du projet de documentaire sur le bocage brayon, et je traîne tant qu'il me rappelle à l'ordre.  

Oh, ce n'est pas la rédaction proprement dite qui m'effraie, ni la recherche ardue de subventions - ça, je sais le faire. C'est le sens de ce projet  qui me manque, et c'est beaucoup plus grave. 

Parce que si j'ai appris une seule chose à Paris, lors du stage pro d'écriture de documentaire, c'est que le cinéma ne vit que d'émotion. Sinon, on ne fait pas de "film documentaire", mais des reportages, parfois austères et rebutants, parfois fort réussis façon Arte, mais il ne s'agit que  de travaux de commande, où le savoir-faire est convoqué mais qui ne "portent" rien d'autre que de l'information, et de jolies images...

Et ce n'est pas cela qui m'intéresse, moi. Même si c'est cela que Clopin sait faire, et qu'il a envie de faire. Bibi, c'est l'humain qui m'intéresse - Rémi Mauger a parfaitement raison de dire qu'il n'y a que cela qui importe. C'est à travers le portrait de mon semblable que je peux apparaître, moi, ma sensibilité, mes choix et mes goûts, mes convictions et mes engagements. Le documentaire n'est qu'un prétexte, le portrait n'est que l'outil. Ce qui seul à mes yeux justifie un tel projet - la sauvegarde du bocage brayon - c'est la part d'humanité dont la réalisation d'un tel film peut témoigner. J'en reviens tout droit à l'émotion...

 

Oui, mais voilà. On ne rencontre pas un Paul-dans-sa-vie,images-6.jpeg

 

 

 

 

 

 

une Jeanne, dsc-0218.jpg

 

 

 

 

 

 

ou l'institeur d'"être et avoir", tous les jours. C'est pour cela que je n'arrive pas à écrire le premier mot du conducteur : parce que, pour l'instant, la haie n'est pas vive... 

 

Certes, Clopin a lui commencé à prendre des images - hier : une démonstration de machine qui déchiquette les rejetons de haie, dont le rendement est tel que le chauffage par ces plaquettes de bois peut alimenter les bâtiments agricoles et la maison d'habitation d'une exploitation de bonne taille - chauffée auparavant par l'électricité... Mais il s'agit là d'économie rurale, non de l'émotion des hommes. Certes aussi, Clopin a capté, sur ma suggestion,  dans le champ du haut, le bruit si particulier du ruisseau et des chants des oiseaux de mars - j'avais été frappée par la clarté de ces deux sons, l'eau et les chants,  se répondant, avant de comprendre que la netteté du tout venait de l'absence des feuilles dans les arbres - et tant pis si personne ne le remarquera jamais, moi je le sais et ça suffit - certes nous pouvons donc commencer à travailler (et donc nous engueuler...) un peu... Mais je ne sais toujours pas quoi mettre dans ce fichu scénario qui me satisfasse et en même temps réponde à la commande de Clopin. Toutes les idées que je peux avoir - remplacer le sujet qui me manque par un dessin d'animal comme le muscardin, dessin animé qui serait inclus dans les images et servirait de fil rouge, ou bien se servir d'une musique comme incarnation éthérée de l'"âme" d'une haie bocagère, ou encore faire partir le film d'un élément naturel comme l'eau ruisselante, l'eau dégouttante, l'eau stagnante, l'eau irrigante, etc., rien ne me "branche" enfin. 

 

J'ai envie de taper du poing sur la table et de réclamer, à corps et à cris, l'apparition d'Elzéard Bouffier... Avant de me souvenir que ce dernier n'a JAMAIS existé, que Giono l'a inventé de toutes pièces. Jusqu'à l'imposture :  devant la demande du Reader Digest qui désirait un portrait de cet héros de papier devenu si vivant, Giono est tranquillement allé  acheter, dans une brocante, n'importe quel portrait de paysan à moustaches qui a fait l'affaire de l'imposture... 

 

 

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Bien entendu, Giono a lui aussi parfaitement raison, comme Rémi Mauger (et Frédéric Back). SI je n'ai pas d'Elzéard sous la main, bon dieu, je n'ai qu'à en créer un... Au moins pour les besoins du scénario. Après, ce que nous filmerons et ferons vraiment, n'est-ce pas, on s'en fiche. De toute manière, les scénarios pré-existants aux films sont détruits quand le projet démarre vraiment. Alors... 

 

J'en suis arrivée  là, et c'est assez effrayant. Me voici, pauvre démiurge, en train de devoir  mettre au monde un homme qui... taillait les haies !!! 

 


 

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12 mars 2012 1 12 /03 /mars /2012 11:52

Pierre Assouline relève en s'étonnant, sur son blog "la République des Livres", la détestation panique de l'écrivain Jonathan Franzen pour internet, twitter, et autres écritures informatiques. Mais à mon sens, rien de plus naturel. Il existe en effet des écrivains dont l'âme obscure utilise l'écriture comme seul rempart contre les ténèbres, dont le mobile est de lutter contre l'attraction trop manifeste  du tombeau,  dont l'imagination a besoin de la nuit et qui, instinctivement, recherchent l'ombre, pour s'en vernisser l'ego façon cercueil. Les écrans lumineux du web ne peuvent donc, logiquement, qu'effrayer ces hiboux qui, avec acharnement, ne réclament  qu'une chose : la permission de continuer à noircir du papier. 

 

D'autant  que l'animal totémique du scribouillard ne peut être que l'hypocondriaque pieuvre, ventousée à son rocher comme on l'est à une chaise devant un bureau. 

 

Et que nous avons tous commencé la chose par de frais doigts roses et menus, que nous n'avions de cesse qu'à tacher d'encre. 

 


 


 

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8 mars 2012 4 08 /03 /mars /2012 12:42

A 15 ans, après la lecture du Deuxième Sexe de Simone de Beauvoir, ma tête était acquise au féminisme. Certes, je n'avais pas tout compris à ce livre, il me manquait du vocabulaire (je me souviens avoir demandé innocemment  à ma grande soeur ce que pouvait bien signifier "masturbation", et avoir immédiatement compris, à sa drôle de tête, qu'il s'agissait là d'une affaire sexuelle...), mais j'avais néanmoins saisi les grandes lignes de l'argumentation, et j'étais tombée parfaitement d'accord : non, rien ne justifiait la domination masculine. Non, la "nature" féminine, animale, perverse, infantile et  hystérique, n'existait pas en tant que telle, elle n'était que la résultante du  terreau culturel et social  de l'oppression. Non, les sornettes religieuses sur le péché originel et les filles d'Eve ne  résistaient pas une seconde à la réflexion. Non, la "prostitution à un seul homme" qui, parce qu'époux, vous payait (fort mal) en retour de vos services sexuels n'était pas la seule destinée possible pour une femme.  Non, je n'étais pas obligée de faire des enfants. Non, mon corps ne "leur" appartenait pas.

 

Ma tête était donc convaincue... Mais mon coeur, lui, n'a commencé à être touché qu'après ma rencontre avec Virginia. Je dis bien "rencontre", car un tel frémissement sublime le simple acte de lire, et cela ne m'est pas arrivé souvent. J'ai certes dévoré les grands romanciers français et russes du 19è siècle, mais je n'ai frémi de la tête aux pieds qu'avec Woolf, Mac Cullers, Proust  et un peu plus tard Giono. Ceux-là sont entrés directement dans mon coeur, sans s'essuyer les pieds sur le paillasson de la raison, ils se sont installés pour toujours et ont planté les quelques panneaux indicateurs qui ont, tant bien que mal et un peu au gré des vents, jalonné ma vie. 

 

Virginia, surtout. Mon premier livre d'elle fut "Une chambre à soi", et je jurai de ne jamais oublier cette première intensité. Puis, je commençais Mrs Dalloway, et là je fus submergée par l'émotion. Il me semblait que Viginia penchait sa tête alourdie de son chignon, vers un  moi agenouillé à ses pieds, et qu'elle me relevait vers elle. Clarissa, à demi-mots, s'entretenait de sa vie de femme, et cette apparente mondaine cachait un univers fantastiquement beau de sensibilité, de compréhension, de rebellion et de passion. Avant de lire ensuite à peu près tous les livres de Woolf, des Vagues au surprenant Orlando, j'ai longtemps scruté le portrait de Virginia, ccroché au mur de ma chambre pendant des années. 

 

Je rêvais en regardant ce beau profil de jeune femme, si pur, photographié avant que la souffrance ne fige les traits de la femme durcie et vieillissante. Je savais  que Virginia cherchait à s'échapper de toute la lourdeur de la tradition victorienne, qui alourdissait sa vie, comme son chignon tirait sa tête en arrière. Tout l'oppression du monde était cachée dans ses cheveux qui cherchaient à retenir cette tête, tendue comme pour s'échapper. Qu'il était lourd, le chignon de Virginia ! Il pesait le poids des viols qu'elle avait subis de ses frères, des morts des figures féminines et aimantes qui avaient veillé son enfance, de  l'oppression victorienne qui l'avait clouée au service de son père, de la domination des hommes qui l'empêchait de prendre son envol, et tout près de la nuque, de la difficulté d'être une femme attirée par d'autres femmes, dans un monde hypocrite.  

 

Qu'il était lourd, le chignon de Virginia, mais son mérite  en était d'autant agrandi. Car son féminisme, au lieu d'être porté avec la force et la  détermination, certes, mais aussi la sécheresse anguleuse de Beauvoir, était empli de sensibilité. Virginia réussissait ce miracle d'être passionnée avec  délicatesse, d'être rebelle avec douceur, d'être féministe avec amour. Elle portait son lourd chignon, mais celui-ci ajoutait encore à sa grâce - lequel, laquelle d'entre nous pourrait en dire autant ? Quel courage d'avancer ainsi, en portant son lourd faix avec toute l'élégante délicatesse qui permettait de le sublimer. Seule Virginia a fait cela. Seule elle a rendu justice au coeur féminin, en peignant sa transcendance. 

 

Encore maintenant, je peux me perdre dans la contemplation de ce profil, en n'ayant envie que d'une chose : d'avancer la main et de défaire, avec humilité, le lourd chignon de Virginia. 

 

 

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2 mars 2012 5 02 /03 /mars /2012 09:35

Ca y est, j'ai reçu mon premier commentaire négatif sur SCRYF, ce site d'écriture partagée initié par Marc Séfaris (auteur dont j'aime beaucoup l'honnêteté par ailleurs...). C'est un certain Nicolas Gracias qui s'y est collé :

 

"Histoire de contraster un peu avec les autres avis, je n’ai pas apprécié ce texte. Je l’ai trouvé un peu mou, peu passionnant (certes, je suis un urbain, mais j’ai tout de même bougé un peu), pas vraiment « profond » – et, pour tout dire, exhumant un fond de bien pensance de conte moraliste un peu vieillot qui ne m’a pas permis de retrouver l’ardeur et le bien-être des 5 ou 6 premières nouvelles des petites histoires familiales, etc… Désolé"

 

Il fallait bien que cela arrive un jour, me direz-vous, et quoi ? Hélas, j'ai le caractère ainsi fait que la critique est pour moi plus importante, m'atteint bien plus,  que l'éloge - sauf en cas de malveillance caractérisée, comme sur la Rdl, où c'est une sorte de sport. Mais ici ce n'est certes pas le cas, et la courtoisie de Nicolas Gracias accompagne d'amitié son avis, avec beaucoup de tact je trouve.


N'empêche que, tact ou pas, mon problème est que j'adhère tout de suite au point de vue du critique. Oui, il a raison Nicolas, le texte mis en ligne était vieillot et bien-pensant. Je SUIS vieillotte et bien-pensante, de toute façon, à cause de mon éducation religieuse qui m'a marquée ben tiens ! Certes, je suis désormais profondément athée, me proclame "femme sans confession" (même si j'avoue beaucoup de choses, ah ah ah) et ne suis plus attirée, dans les églises, que par la beauté des architectures et des oeuvres d'art. Mais on n'abolit pas comme cela les règles apprises dans l'enfance : je me suis surprise à donner du "ma soeur" à une religieuse que j'aidais à traverser la rue, presqu'instinctivement c'est dire, mon premier réflexe est toujours de préférer l'autre à moi-même, jusqu'à un certain mépris de l'apparence physique  qui est très catholique et dont j'ai  le plus grand mal à me débarrasser. Je crois que tous mes textes laissent affleurer, malgré moi ai-je envie de dire, cette éducation que j'ai dû sévèrement combattre. Il y a une allusion à la vierge Marie dans le texte critiqué par Nicolas, que j'ai laissée parce que je trouvais qu'elle élargissait le propos, mais qui fait "remonter", ainsi, derrière un récit de ma vie actuelle, le clocher de l'église Notre Dame de la Couture, les leçons de  catéchisme et  la douleur aigüe de mes genoux écorchés par la paille des prie-dieu.  

 
Bon, je ne suis pas entièrement d'accord pour autant avec Nicolas, notamment sur le côté "mou" du récit. Ou bien disons que je touche là une de mes limites - car je ne peux pas écrire de manière plus concise, plus tendue, plus ramassée que cela. Je ne suis ni célinienne, ni américaine (ah, j'aurais tant aimé être Carson Mac Cullers, mais il faut s'accepter telle que l'on est, pas vrai ?). La terre me colle désormais aux talons, et la mollesse relevée par Nicolas n'est peut-être que la lourdeur glaiseuse qui me caractérise.  

 
Et j'ai l'impression d'avoir touché là, aussi, la limite de ma participation à de tels sites. ON peut y voir, bien entendu, un orgueil démesuré, une vanité refusant de supporter les réserves et un égoïsme empêchant de s'intéresser à l'autre. Mais en fait, le problème de la valeur de ce que je fais m'est récurrent, permanent, douloureux à l'extrême. Il m'a inhibée pendant des années, et encore maintenant, si l'adhésion n'est pas totale, je ne peux m'empêcher de préférer tout détruire plutôt que de tenter de modifier un texte d'après les critiques reçues. Ce risque, tout détruire d'un trait, d'un clic plutôt, est si réel qu'il s'étend jusqu'aux blogs (quand j'ai fermé le premier, c'est Clopin qui a tenu à préserver le tout) et jusqu'aux plus modestes de mes écrits. Ah là là.

 
Bien entendu, je pourrais aussi, dans ces conditions, aller sur SCRYF uniquement pour lire et critiquer les autres auteurs. Il y a tout un tas de gens bien là-bas, animés par les mêmes espoirs que les miens, fiers et modestes à la fois. Comme une petite famille bien chaude et enveloppante - qui peut, peut-être,  briser la solitude ontologique des scribouillards de mon espèce. Sauf que, là encore, je sais que je peux blesser profondément et sans le vouloir, et comment courir ce risque ? Si je décide de ne pas le courir, alors je suis hypocrite. Si je décourage quelqu'un, je suis dégueulasse... Tout le monde n'a pas le tact ni la délicatesse de Nicolas, et il doit en être, sur SCRYF, comme partout ailleurs : la tendance à, en toute honnêteté, juger "bon" le texte d'une personne que vous trouvez aimable, et "mauvaise" la production de quelqu'un qui, pour une raison ou une autre, vous a déplu, doit être bien forte... 

 
Et d'ailleurs, je déteste Nicolas Gracias à présent. 

 

ahaha. 


Pourtant, c'était un bel essai, et j'y suis allée avec confiance. Mais c'est trop dur pour moi, en fait. Je crois que je n'irai plus là-bas, malgré la qualité, la modestie et le talent des contributeurs, qu'en dilettante. Comme pour tout le reste, quoi... 

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26 février 2012 7 26 /02 /février /2012 11:12

Vous ne connaissez pas Daaphnée. Mais ce n'est pas grave, parce qu'il existe beaucoup de Daaphnées, et que chacun d'entre nous, hélas, en a croisé une un jour dans sa vie... Vous savez, cette prof un peu pimbêche, qui virait facilement hystérique et se vengeait du désordre de sa classe au travers de notes injustes - sans compter qu'il ne valait mieux pas être une jeune fille fraîche et jolie dans ses cours, car Daaphnée professe le même penchant que la méchante Reine à se mirer dans les miroirs flatteurs, et n'hésite pas à abuser de son pouvoir pour se venger, fût-ce de la simple supériorité d'une jolie jeunesse. Oh, quand elle pose, avec satisfaction un "3" à une copie qui en vaut 12, elle ne songe pas qu'elle détourne la notation de sa fonction première, qui est d'apprécier la valeur de l'élève. Il lui suffit d'assouvir, comme les plus petits esprits, sa soif de réparation...

 

Perso, ma première Daaphnée, je l'ai rencontrée à Rouen. J'avais 17 ans, je sortais d'une famille plus que modeste et j'étais entrée dans l'église Sain-Ouen, où une répétition avait lieu pour un concert du soir. Il devait bien y avoir 80 choristes, et j'étais si impressionnée de ce que j'entendais que j'ai osé demander à la dame en fourrures, assise à côté de moi et qui avait parlé pendant toute la répétition, le nom du morceau. Elle avait laissé tomber un regard de haut en bas vers moi, s'était visiblement demandé s'il convenait de me répondre, puis avait fini par lâcher, avec tout le mépris possible, que c'était "le requiem de Mozart, évidemment !" avant de se retourner (de peur d'être contaminée par mon ignorance ?) vers ses amis... 

 

Les Daaphnée sont ainsi. Pire que Finkielkraut, elles sont assises sur l'agréable sentiment de leur supériorité, attestée par des diplômes qui sont pour elles (comme le prix de Conservatoire pour Morel, dans la Recherche) le bâton de Maréchal de l'intelligence - alors que ce ne sont, en fait, que des attestations de présence. Je ne veux pas dire que les études ne soient pas des gages de culture, au contraire. J'ai la plus grande admiration pour les érudits - mais j'ai remarqué que les esprits les plus étincelants, les professeurs les plus savants, les diplômés les plus brillants sont souvent des personnes de grande valeur morale - qu'elles sont d'une simplicité sans égale, et cherchent avant tout à partager leur savoir. Daaphnée, elle, considère son savoir comme Sarkozy ses amis du Fouquet's. Une façon de se prémunir contre les mains sales du peuple, si celui-ci avait l'idée saugrenu de s'approcher de la culture, voire même d'en revendiquer l'accès. Quelle horreur ! Daaphnée ne consent qu'à parler qu'au bac + 5, et encore, n'est-ce pas, pas n'importe lesquels. Les esprits choisis par elle devront, avant tout, faire allégeance, et la flatter agréablement.

 

j'ai rencontré Daaphnée chez Assouline, et bien entendu j'ai fait un grand détour pour ne pas fréquenter cette agréable personne. Mais elle s'est déchaînée, accablant des internautes comme Lavande de son mépris, professant une coquetterie sans borne pour les machos qui croisent (et ils sont nombreux, hélas) dans les couloirs de la République des Livres, et surtout tentant d'imposer silence à toutes les voix discordantes, dont la mienne. Au moment de l'affaire DSK, (elle était évidemment convaincue de l'innocence et de l'excellence de ce dernier, professait la hauteur de la "séduction" française entre les sexes, honnissait les sales féministes et coquetait de plus belle), comme j'évoquais la figure de victime de Diallo, elle ne sut plus que glapir "taisez-vous, Clopine, taisez-vous !" Ce qui, je dois le confesser, m'a légèrement échauffé les oreilles. Non mais...

 

Depuis, elle me vomit d'une haine féroce. Cette haine lui déforme tant les traits qu'on croirait une figure d'Ensor, comme celle-ci :

 

 

 

JamesEnsor.jpg_2022237751.jpg

 

 

 

 

 

 

Mais ce risque d'être caricaturale ne pèse pas bien lourd, pour Daaphnée, devant la folie de la détestation qui la saisit, dès qu'il s'agit de moi. IL faut absolument qu'elle se répare de ma présence sur cette planète, et surtout de ce que je représente, qui est à l'opposé de ses certitudes, de son élitisme, de sa pratique de la coquetterie. Elle m'appelle "la gardeuse d'oies", ou "la fermière" -ce qui est pour elle la plus grande des insultes...

Pauvre Daaphnée ! J'en viens presque à la plaindre, tant cette "haineuse" se dévoile facilement, et tant sa rage est impuissante, pour de vrai. D'un autre côté, elle peut m'être utile - car il existe tant de Daaphnées qu'on  peut  utiliser ce matériau, même boueux, si l'on veut témoigner de son temps. La Haineuse - il me semble que, dans la Femme Rompue, Simone de Beauvoir donnait la parole à une représentante du genre, dans un monologue frisant la folie. Un jour, peut-être me risquerais-je à en faire de même pour la Daaphnée qui me hait ? Si j'ai du temps pour ça, évidemment. 

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24 février 2012 5 24 /02 /février /2012 10:04

Comme j'aime beaucoup Marc Séfaris, j'ai suivi le conseil de Nicolas qui me recommandait, plutôt que tenter ma chance à des concours, d'aller sur le site de SCRYF ; contrairement à des sites de mise en ligne de textes comme IN LIBRO VERITAS, qui certes est libre d'accès mais se veut néanmoins une entreprise commerciale, par le biais de l'auto-édition offerte aux participants, SCRYF est associatif, indépendant, et n'offre rien d'autre que la bonne volonté de ses participants (si j'ai bien compris).

 

Bon, jusqu'à présent, l'essai n'est guère concluant : j'ai envoyé le recueil de nouvelles là-bas, un "lecteur" n'a pas pu ouvrir le fichier et l'autre a téléchargé, mais visiblement reculé devant les 72 pages. 2 seuls lecteurs, donc, mais comme le site est compliqué et peu visible, cela peut peut-être s'améliorer. Donc, en fait, ce n'est rien, c'est le jeu, mais le plus embêtant est qu'il faut , là comme ailleurs, apprendre le fonctionnement visiblement compliqué du site, s'y retrouver entre "groupes" et une multitudes d'onglets, voir une discussion s'ouvrir ici mais ne pas savoir comment la rejoindre etc. C'est la plaie courante du web : les sites, même les mieux faits, demandent un apprentissage fastidieux... Si je n'ai pas encore (et j'en bâille d'avance,  à l'idée de devoir intégrer les différents clics nécessaires pour aller en tel ou tel point, bref...) réussi à simplement échanger avec qui que ce soit là-bas, je dois reconnaître que le téléchargement est, lui, vraiment facile à partir de l'onglet "écrire". Contrairement à la pesanteur qui règne sur In libro veritas. 

 

J'ai lu un texte ou deux "des autres". Là encore, aucune simplicité pour commenter : je n'ai pas encore trouvé le chemin adéquat, et puis il y a un invraisemblable code chiffré pour répertorier votre commentaire (oui oui. Genre, commentaire poussé niveau4, commentaire moyen niveau 2, etc !!!) parfaitement rebutant. Là encore, visiblement un apprentissage du site (savoir où répertorier votre genre de comm" avant même de commencer à l'écrire) est nécessaire, et fastidieux. 

 

m'enfin j'imagine qu'avec un peu de persévérance on doit pouvoir apprivoiser ce labyrinthe complexe. Mais la persévérance demande du temps, hélas ! Et en ai-je tant que cela ? S'il s'agit de simplement mettre mes textes en ligne et d'attendre des retours, in libro veritas fait parfaitement l'affaire.. 

Enfin, le plus sérieux reste à venir. 

 

D'abord, le principe même. S'il est très généreux de proposer d'échanger textes et jugements, le tout sans aucune perspective commerciale, cela relève pourtant, à mon sens, de l'utopie. Car les textes, même et surtout ceux des parfaits amateurs, sont souvent  écrits avec une plume trempée dans la chair des sentiments, et le sang de l'émotion. Tout jugement négatif risque (je dis bien "risque") de rencontrer, en retour, une "réaction" humaine, si humaine... Si j'en juge par moi-même, c'est une sorte de crime suprême - comme lorsqu'on semble attaquer mon fils, tenez - que de méconnaître la valeur d'un de mes textes. J'ai une tendance à détester si instinctivement celui qui ose me dire qu'il n'apprécie pas vraiment ! Et je crois que nous en sommes tous là. Il faut donc rencontrer une grande bienveillance, a priori, et avoir confiance dans cette bienveillance pour accepter la critique. Or, par définition, les participants d'un site comme Scryf sont un peu des concurrents, non ? 

 

Enfin, the last but not the least, je suis allée là-bas à cause de la suggestion de Nicolas, comme une sorte d'alternative aux concours de nouvelles. Or, il ne faut pas plus de trois minutes pour tomber... sur la liste des concours de nouvelles ouverts aux amateurs... 

 

Je reconnais donc la générosité de la démarche, mais j'émets les plus grands doutes sur sa pertinence. J'aimerais bien que Marc m'en parle un peu plus ! En tout cas, je suis de temps en temps "démarchée", ou simplement informée,  pour participer à des sites de la même sorte. Hélas, je ne vois pas trop ce qu'ils peuvent m'apporter de plus que l'accueil neutre, un peu indifférent mais néanmoins efficace (j'ai des nouvelles qui ont ainsi reçu plus de mille lecteurs...) d'In libro Veritas. 

 

Seule différence : l'absolu désintéressement, a priori, des constructeurs du site. Mais, littérature ou pas, quand il s'agit de bénévolat, le plus beau et le  plus complexe des réseaux ne tient bien souvent qu'à l'implication d'une ou deux personnes, pas plus. Quand ces dernières sont fatiguées, et qu'il n'y a pas de relais...

Eh bien, on en revient aux bons vieux concours de nouvelles, pas vrai ?

Clo  

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