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17 juin 2013 1 17 /06 /juin /2013 10:05

Me voici de retour de Prague, après une semaine intense : mais après tout, quand on est parente de Clopin Trouillefou "roi de Thunes, successeur du grand coësre, suzerain suprême du royaume de l'argot"... et un peu souverain de Bohême aussi, Prague vous est forcément familière : vous "reconnaissez", confusément, les lieux... D'autant qu'il suffit, là-bas, de faire un pas de côté pour quitter la horde touristique qui, comme ailleurs, déferle sur les quatre sites qui lui sont abandonnés : la part du feu, le repli devant les Attila du bitume pragois. Heureusement, la ville est vaste et je suis toute petite... Et puis il ne faut pas s'illusionner : je suis moi aussi une touriste, exactement comme les autres. J'ai pris du plaisir à écouter les bateleurs qui rançonnent la foule, en douceur et profondeur... Pourquoi le nier ? 

 

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Je suis encore en stade de couvaison : le temps de distancier  mon voyage sera ici particulièrement long, j'en ai peur. C'est Clopinou, retrouvé le temps d'une courte halte à Paris, qui a résumé le mieux l'affaire : "On dirait que tu as aspiré la ville", m'a-t-il dit, "comme une éponge !" Il faut dire qu'après deux ans sans bouger, j'avais rudement soif. 

 

Et puis quel plaisir de revenir chez soi, même sous un ciel désespérement chargé. Clopin fulmine : "le miel va cristalliser, je ne vais rien récolter du tout !", les roses n'arrivent pas à terme et les fraises sont encore à l'état de projet. Mais cependant, s'étirer dans son propre lit, la fenêtre ouverte sur les chants matinaux des oiseaux, et regarder vaguement le vert des feuilles mouillées, qui tremble sous la pluie d'été : c'est un plaisir aussi, qui surpasse l'inquiétude potagère, d'autant que les pluies d'été exaltent l'odeur puissante de la végétation.

 

Je m'étire...  Je prendrai le temps qu'il faudra, pour tenter d'exprimer ce que fut ce voyage ! 

 

 

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3 juin 2013 1 03 /06 /juin /2013 13:10

Samedi dernier, je suis allée dans ma ville natale. J'ai beau m'en être enfuie  il y a quarante ans, à toutes jambes, l'enfance, même perdue,  perdure : j'ai éprouvé un grand plaisir  à parler avec certains de ses habitants.

 

Non seulement parce que j'obtenais ainsi des nouvelles de Jude Stéfan (L'est-y mort, l'est-y vivant ?), mais encore parce que l'enfance se réfugie aussi dans les mots communs à un endroit précis, et surtout les noms de lieux. Si je demandais où était le 2, rue de la Charentonne, je savais que le passant qui allait me renseigner partagerait avec moi la connaissance du Cosnier, qui coulait dans mon jardin, voire même,  avec un peu de chance, du lavoir de Saint Quentin des Prés. Le boulevard Dubus, la rue du chanoine Porée, le Monument aux Morts, la trompette qui annonça l'arrivée des Prussiens, l'évocation du parquet grinçant, glacé et glissant de l'ancienne Bibliothèque Municipale, en haut de l'escalier monumental de l'Hôtel de Ville, le cinéma Le Piaf,  quel bonheur d'employer leurs noms au présent, et de les faire ainsi ressurgir, comme on tire un ancien stylo-plume d'une vieille trousse d'écolier. On m'a demandé "d'où j'étais" : j'ai évoqué la rue Alsace-Lorraine du quartier du Stade, puis la rue Guy Pépin, sur la route d'Orbec. J'ai passé le restant de mon après-midi à sillonner les lieux, pour le simple  plaisir de lire les plaques ; même le cimetière de la Couture, où reposent mes parents sous une simplissime dalle de granit, en était réchauffé ;  il est vrai que c'était le premier jour d'un printemps mort-né, mais enfin il y avait du soleil ! 

 

L'autre soleil de ce jour-là fut d'aller écouter François Bon, qui présentait son dernier livre dans le cadre du festival "terres de paroles"; l'année dernière, j'étais allée écouter Anne Alvaro lire Annie Ernaux... Cette dernière sort tout droit d'une  épicerie,  près d'Yvetot : allons, la campagne normande est encore féconde pour la littérature ! François Bon, lui, est un enfant du Marais. Son "autobiographie des objets", qui s'entrechoquait avec les noms de lieux que j'égrenais comme un chapelet, comme l'invocation d'un sésame, s'inscrit dans la longue lignée des "inventaires". Son livre  me faisait penser à la fois aux allumettes suédoises de Sabattier, aux choses de Pérec, aux mythologies de Roland Barthes - et à la collection de petites voitures du pauvre Jim. Il me ramenait aussi tout droit à Clopin, qui aurait, j'en étais persuadée, un très grand plaisir à le lire. François et Clopin partagent  le même sédiment : âge, milieu social, propension à l'esprit scientifique, nostalgie d'une enfance enchantée par la découverte du pouvoir de l'homme sur les choses... Le soir même, au restaurant, je lui  fis découvrir le livre de François Bon : je ne m'étais pas trompée, l'intérêt fut immédiat.

 

Mais ce qui m'a le plus intéressée ne fut pas la madeleine que les gens de ma génération ingurgite dès les premières pages de l'"autobiographie des objets" - mais bien le style particulier de François Bon. Ce dernier a une manière de manipuler le français qui est très étonnante (*). J'ai coché les pages du livre où certaines phrases m'éberluaient : j'en ai compté, à la fin,  plus de quatorze ! Vous me direz que Chevillard partage avec Bon cette surprenante particularité : le lecteur entre dans ses phrases sans savoir comment il va en sortir... Mais c'est encore différent chez Bon. Il y a là comme une pensée qui se ramasse sur elle-même, au mépris du confort habituel, du "déroulement" offert d'habitude au lecteur. tenez, une entre dix, à propos du coiffeur chez qui "un homme normalement constitué (devait) passer chaque trois semaines" : "(s'il avait un prénom, probablement, mais je ne le sais plus)". Ou encore "je ne crois pas qu'avec l'Anglais on ait échangé sur ces carcasses aperçues dans le fond des ravins : statistiquement, nous avions la meilleure chance de passer, la preuve;"

 

Ce n'est pas, à mon sens, une simple utilisation de l'ellipse, comme certains écrivains utilisent des "trucs". Non, c'est bien plus joli que cela. Comme si l'auteur se mettait à penser devant vous...  La gentille mais, à mon sens, totalement inutile (**) "'animatrice de débat", dont la présence m'empêchait de poser les multiples questions  qui me venaient au lèvres - mais j'étais déjà bien  trop intrusive....  n'a évidemment pas touché mot de cette particularité. Or, plus que dans le fond commun des mots de l'époque, de notre prime enfance, à Clopin, François Bon et moi-même, c'est bien dans la force de ce style épuré (non comme celui d'une Ernaux ou d'un Coee, qui utilisent le langage comme un scalpel, mais comme une sorte de mathématique des mots ; or, même une équation peut être "belle" ou "laide", n'est-ce pas ?) que réside le secret : à savoir que l'enfance de François Bon, par la magie des mots et de cette pensée agissante, fait naître une émotion qui dépasse largement le cadre étroit de l'enfance particulière... 

 

Et c'était donc une sorte de coïncidence fastueuse que de rencontrer l'écrivain dans la ville même où la plus petite plaque de rue n'est, pour moi, que le couvercle des mille anecdotes de mon enfance passée.

 

Le lendemain, foire aux ânes "aux Marais"...  non poitevin mais brayon, avec petite fille, et quelle !!!

 

 

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 (*) : d'après François Bon, Jérôme Lindon l'avait lui aussi remarqué...

(**) : l'écrivain n'a aucun besoin d'une quelconque "animation" ; j'ai rarement rencontré pareil bateleur, jouant avec les objets, faisant voler ses appareils web  fuser ses mots et, quand il  lit ses textes, créant une sorte de "tempo corporel" qui accompagne sa lecture et donne une piste sur la manière dont il écrit. En référence constance à la musique, quoi. L'animatrice en était réduite à le "freiner", ce qui me faisait quelque peu grincer des dents. Quel gâchis, de freiner François Bon, alors que l'homme est si visiblement communicatif, à mille lieues de la prudente réserve d'un Assouline, par exemple...

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12 novembre 2012 1 12 /11 /novembre /2012 17:30

... J'écris une phrase un peu pompeuse : "les joies de l'esprit ont été les plus pures", et je constate avec effroi qu'on la croirait tirée d'un missel ou de la torah, tombant des lèvres d'un personnage de Delly, extraite des mémoires d'un prix nobel de physique, ou encore précédant l'autobiographie de Mitterrand (François)

 

... Alors que je parle seulement de ma dernière année de maternelle, celle où j'appris à lire et où cette soudaine, merveilleuse et féconde faculté m'est apparue constituée d'une matière à la fois  solide  et impalpable, colorée et transparente, sans rien des autres appétits qui m'agitaient (le contenu de mon goûter et la longueur de mes nattes, comparée à celles de mes petites voisines) - et que cette matière, comme l'or alchimique, ne pouvait être qualifiée autrement que l'eau la plus vive... 

... Mais cette ineffable pouvoir d'apprendre que B. A. se lit BA ne devançait que d'une courte tête la joie que me procurait, autrement plus concrète, la peau lisse du beau marron renflé que j'avais ramassé à la récréation et que je gardais depuis, secret et compact, dans la poche de ma blouse rose. 

 

 

 

 

 

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8 novembre 2012 4 08 /11 /novembre /2012 15:44

(Rose, vous voici du côté de Clopin... Merci à vous de votre gentille intervention).

 

En fait, pour me changer les idées, non seulement je peux regarder les photos de Cartier-Bresson, si pleines d'humanité, mais encore lire les petites chroniques rouennaises de Félix Phellion.  Je partage avec lui la ville de Rouen, même si j'ai très souvent l'impression d'y avoir habité fort différemment. Il est mon aîné de quelques têtes, et nous ne fréquentions pas les mêmes lieux, enfin, pas de la même manière. Ce doit être pour cela que, lorsque je le lis, à la fois je m'y retrouve, et je m'y perds. 

 

Sa dernière chronique, par exemple, sur le "BIg Ben Pub" : une madeleine, certes, qui nous est commune, mais fourrée si différemment !

 

Je crois que, lui comme moi, avions  relevé  cette incongruité : le Big ben Pub est (était) un café installé dans une fort vieille maison rouennaise (17è ?), c'est-à-dire une maison haute, étroite, malcommode, à un angle de rue si refermé que le soleil a bien du mal à entrer par les fenêtres de toute façon insuffisantes, et  par-là dessus située à un angle de la rue du Gros Horloge, en vis-à-vis de l'Horloge en question, comme si on pouvait, au sortir du bar, se servir de la sombre encoignure comme urinoir en quelque sorte (si proche du monument historique : à un jet de p... près, pour tout dire...).

Et appeler cette maison "Big Ben Pub" !!! Il fallait le faire : revanche de l'anglois pourtant bouté hors de là, fumant encore de vapeurs de pucelle  ? 

 

Félix sent encore  le goût de bières rouges dans le fond de sa gorge, quand il évoque l'endroit... Mais moi, c'est la figure de mon amie Isabelle, perdue de vue depuis qu'elle est partie vivre en Suède, qui me revient tout droit.

 

Allez, je vous raconte tout. 

 

Isabelle était une fille perdue de la bourgeoisie rouennaise. Papa médecin ou chirurgien, je ne sais plus, qui, sur le tard, s'oriente vers la sexologie (!), pendant que Maman pratique strictement le catholicisme, puisque coincée du cul avec toute la ferveur requise.  

Grande maison avec beau jardin et murs d'enceinte, sur le bon côté de la ville, le quartier Saint Gervais et ses côteaux ensoleillés. Et divorce final et prévisible  des parents qui fait trembler tous ces beaux remparts jusqu'à révéler les failles les plus secrètes - frère schyzophrène, Isabelle qui part, voyage, et revient, agitée et pourtant douce, rompant et rompue par cette famille si flaubertienne... 

 

Je l'avais rencontrée à un stage de violon folk. C'était de ma part une idée saugrenue : mes doigts comprennent un index si déformé que toute pratique instrumentale m'est a priori fort difficile d'accès, à part le triangle et la vielle à roue (et encore, pour cette dernière...bref). Mais justement : la main droite, au violon, ne fait "que" tenir l'archet, je pouvais espérer... Je n'espérai pas longtemps.

Isabelle, elle, était vraiment douée. L'oreille juste, le sens de la mesure et le goût du partage. Je me souviens encore des premiers mots qu'elle m'adressa : "Je ne peux pas y croire", me dit-elle.  

"Croire quoi ?"

"Qu'il ait sauté"

"Qui ça ?"

"Mon frère, Gilles. Il est sorti de l'HP, il a pris le train, il est venu à Rouen, il est monté à Mont Saint Aignan, il a grimpé dans un immeuble et il a sauté du toit. Je ne peux toujours pas le croire. Tu ne voudrais pas venir avec moi le voir, au centre de rééducation ?" 

 

Nous étions toutes deux en train de ranger nos violons dans leurs boîtes, quand nous avons échangé ces mots. C'était presque le moment que je préférais, dans le cours. Le beau velours bleu qui garnissait le bois, comme un cercueil de luxe où l'on déposait l'instrument que j'avais fini de torturer, la fixation de l'archet au couvercle, la peluche rouge qu'on étendait soigneusement sur le ventre du violon, encore couvert de poussière blanche de colophane, la petite case où l'on rangeait le chiffon et la petite boule de résine orangée... La boîte, cette fois-là, est restée aussi ouverte que ma bouche et mes yeux : toute grande.  Isabelle a continué, d'une voix aussi calme et douce que sa main faisant glisser l'archet, de me parler de son frère. Il était resté aveugle et paraplégique de sa chute, mais Isabelle tentait pourtant de lui faire rencontrer d'autres personnes que  les amis de sa mère, curés, bonnes soeurs et âmes pieuses qui venaient faire la morale au jeune homme.  Celui-ci n'écoutait guère. Traîné dans les églises, les réunions paroissiales,  jusqu'à Lourdes bien évidemment,  il profitait de toutes les occasions pour faire les poches à ceux qui  poussaient son fauteuil roulant, planquait les billets récoltés  et arrivait ainsi  à se procurer les clopes qu'il fumait en cachette. Sa mère croyait qu'il était possédé par le démon, et multipliait les prières...  Il va sans dire que, prévenue par Isabelle, la première fois que je le rencontrai (en douce), je lui refis sa provision... 

 

C'était pour le revoir qu'Isabelle était revenue à Rouen, quittée pendant la révolte de l'adolescence. Mais elle était  fort peu acceptée dans la maison maternelle, conquise de haute lutte dans le partage du divorce. Il lui fallait payer sa chambre en ville, se nourrir, s'habiller par elle-même : si elle voyait encore de temps en temps son père, sa mère la tenait pour responsable de la maladie et de la tentative de suicide de son frère. Les vivres à peu près coupées, Isabelle devait subsister : elle faisait donc la manche, le soir dans les cafés. Activité certes lucrative, enfin relativement, mais cependant dangereuse pour une jeune fille comme elle. Etre deux semblait le minimum pour s'assurer une certaine sécurité ! 

Car Isabelle était belle, vraiment belle,  d'une manière presque médiévale, et donc souvent en proie à des propositions appuyées. Blonde, les yeux bombés et bleus, le teint de porcelaine comme on dit, mince et élancée, une voix douce - et une naïveté  abyssale. Ce fut donc son instinct, plus qu'un raisonnement quelconque, qui me désigna à elle. J'étais brune, bien moins jolie sans être pour autant repoussante, mes cours de violon m'avait permis d'ânonner quelques notes, je pouvais l'accompagner, et il se trouvait justement que mon aspiration à la liberté me conduisait moi aussi à vivre d'expédients. Et je n'étais certes pas aussi naïve, ni si démunie devant le désir masculin ! 

Nous avons ainsi traîné, elle et moi, pendant quatre ou cinq mois, jusqu'à ce que je jette l'éponge. Car "faire la tournée" des restaurants et des bars, le soir, pousser la chansonnette pendant qu'Isabelle m'accompagnait au violon, ou bien jouer à deux "greensleaves" ou d'autres petites mélodies (Isabelle tentant de planquer mes fausses notes tant qu'elle le pouvait) rapportait assez bien.  Mais Isabelle était décidément trop étrange, trop désemparée et en-dehors de la réalité, même pour la libertaire idéaliste et débridée que j'étais à l'époque. Je ne pouvais plus la suivre. 

La rupture eut lieu un certain soir, en sortant du "Big Ben Pub". Le patron nous y acceptait sans diffculté, comme la majorité des cafés et restaurants où nous allions,  malgré l'exiguïté de l'endroit, parce qu'Isabelle et moi étions (sans en avoir conscience, à l'époque) une certaine attraction. Dame !  Nous n'avions  pas quarante ans, à nous deux...  Imaginez-nous deux secondes : je portais à l'époque de grandes jupes indiennes, rouges et froncées à la taille, et la sangle de mon étui à violon, trop lâche, venait appuyer sur ma poitrine. Je portais un chapeau à large bord, en feutre, qui servait pour la quête. Isabelle, elle, rayonnait de féminité dès qu'elle souriait, si doucement. Nous nous regardions en souriant, pendant l'accordage, elle devait toujours m'encourager un peu pour le violon, tant j'avais honte de ma piètre prestation.

La quête qui suivait marchait mieux si c'était elle qui passait le chapeau : elle regardait  naïvement, droit dans les yeux, les buveurs et mangeurs, et puis elle jouait vraiment bien, et en plus elle était bien plus belle que moi. Mais nous partagions quand même la recette  à parts égales, ce qui était gentil de sa part...  Parfois le patron d'un restaurant qui n'était pas encore l'Etoile d'Or nous offrait le couscous.  Nous n'osions pas refuser. 

Mais un soir, Isabelle, la douce Isabelle, "péta les plombs". Nous étions donc au Big Ben Pub, il devait être vingt-trois heures, et nous poussions notre maigre répertoire devant une quinzaine de tables toutes occupées de jeunes cadres dynamiques. Les applaudissements furent-ils trop clairsemés pour elle ? La quête précédente avait-elle été trop maigre ? Toujours est-il qu'Isabelle se mit à interpeller une table où trois jeunes gens, sans nous accorder le moindre regard ni la moindre attention, avaient continué de converser pendant notre prestation. Et voilà mon Isabelle qui se met à les engueuler ! "Vous pourriez AU MOINS nous écouter. On vient ici, on se casse le cul à jouer pour vous, et vous, vous continuez à parler, vous haussez même la voix..." 

J'étais horrifiée, et les clients en question si ébahis, qu'ils mirent quelque temps à comprendre  ce qu'Isabelle leur criait aux oreilles. Je tentai de l'entraîner, que l'on sorte de là le plus vite possible avant que le patron n'appelle les flics ou qu'un client ne vienne lui fiche une baffe, mais bernique. Isabelle gueula de plus belle, dès qu'un client osa protester qu'il était venu là pour prendre un pot tranquille avec ses potes, et qu'il n'avait nullement demandé à écouter quoi que ce soit ; surtout pas deux filles comme nous, dont le répertoire et l'aspect lui étaient parfaitement indifférents... 

Le patron arrivait, attiré par le bruit, pendant qu'attrapant Isabelle par le bras, je fis la seule chose qui pouvait la calmer : je lui arrachai son violon des mains, et sortis le plus vite possible : seule façon pour qu'elle me suive Sur le trottoir, je tentai de dire à Isabelle que c'était les clients qui avaient raison, pas elle. Mais elle ne voulut rien entendre. Non, d'après elle, les "artistes" avaient le droit d'être "respectés". Les clients du Big Ben Pub n'étaient que des gros fachos, voilà tout. Et des cons, par-dessus le marché. D'ailleurs, moi aussi j'étais idiote : en lui arrachant son violon, j'avais pété une clé... 

Et nous voici toutes deux, assises sur le trottoir devant l'agence du Crédit Lyonnais de la rue Jeanne d'Arc. Isabelle pleurant dans mes bras et me demandant pardon. Moi me sentant poisseuse, fatiguée, dans l'impossibilité de continuer à la suivre nuit après nuit, avec les regards des buveurs sur moi, la fumée de leurs clopes dans le nez et absolument aucun sentiment d'être l'"artiste" dont Isabelle se réclamait. 

Nous sommes restées amies, malgré la séparation de notre duo . Mais je la regardais désormais autrement : comment pouvait-on allier, ainsi, une telle énergie, une telle sensibilité,  la plus parfaite ingénuité, avec une si évidente incapacité à comprendre le monde comme il va ? Elle me faisait penser au Baptiste des Enfants du Paradis.

Il ne faut pas trop s'approcher de ces fragiles-là. Ils ont tôt fait de vous casser... 

Quant à moi, je n'ai plus jamais pénétré dans le Big Ben Pub. La bière qu'y buvait Félix Phellion était rouge, nous dit-il. Moi, ce sont les joues qui m'en brûlent encore... 

 

 

(petite musique d'époque pour remercier ceux qui m'ont lue jusque là ! Et attention, hein : moi, je n'engueule pas les autres...)

 

   
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4 octobre 2012 4 04 /10 /octobre /2012 11:25

Je suis peu soluble dans le collectif, je le sais. Le mot "comité de pilotage" (à propos d'un projet de film en cours), entendu ce matin au téléphone, a hérissé les poils de mes avant-bras, comme un chat surpris par le bruit intempestif de l'aboiement d'un chien : un sursaut, un refus immédiat,  comme si "piloter" signifiait "ordonner", et comme si je ne pouvais m'y soumettre...

Je dois être orgueilleuse, au fond. Pourtant, je croyais savoir, depuis le CM2, ce que l'orgueil voulait dire, et quels abîmes il cachait. La petite Christiane avec ses robes à carreaux, façon kilt, qui virevoltaient quand elle tournait sur elle-même, dans la cour de récréation,  l'était, orgueilleuse. Martine lissait sans arrêt ses longs cheveux bouclés, ce qui lui valait de longs regards envieux.... Je faisais partie, face à ces incontestables supériorités, des peu sûres d'elles-mêmes, des gauches et maladroites... Mais on m'apprenait que rien ne valait, pour mon avenir éternel, une saine humilité. J'évitais donc simplement d'applaudir trop fort devant les succès des autres : j'avais l'admiration discrète, et je préférais taire la critique trop facile, qui aurait consisté à trouver Christiane d'un snobisme désastreux et Martine d'une coquetterie sans borne...

Mais, même caché, contenu, bridé par la plus forte des laisses, celle de la volonté, l'orgueil s'échappe. Je dois donc être orgueilleuse... Ma mère aurait haussé les épaules : "mais de quoi, ma pauvre fille, de quoi donc ! ?", et ma soeur aurait sifflé "mais pour qui se prend-elle, celle-là ?" 

Elles auraient  eu raison. En tout cas, c'est ainsi, et puisque je  suis incapable de me dissoudre, il est préférable que j'ai de l'orgueil: au moins celui  de ma solitude. 

 


 


 

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21 septembre 2012 5 21 /09 /septembre /2012 10:50

Je ne sais même plus depuis quand nous sommes  abonnés à Charlie Hebdo.  Perso, je  l'ai lu depuis le "bal tragique  à Colombey : un mort", et puis j'ai repiqué au truc dès qu'ils ont reparu, après leur traversée du désert. C'est dire que mon soutien est total et non négociable.

Et s'il faut aller contre-manifester pour lui, j'en suis. 

Non mais. 

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16 septembre 2012 7 16 /09 /septembre /2012 10:21

Ce n'est pas masochisme, non. C'est par désir de crédulité - je viens de lire cette phrase de Borges  :

 

"je n'écris pas pour une petite élite dont je n'ai cure, ni pour cette entité platonique adulée qu'on surnomme la Masse. Je ne crois pas à ces deux abstractions, chères au démagogue.

J'écris pour moi, pour mes amis et pour adoucir le temps"

 

Je voudrais tant  y croire, mais mon premier mouvement a été de dire  : "facile d'émettre une telle pensée, pleine de sagesse et de réconfort,  quand on est vieux, et qu'en se retournant, on voit une vie bien construite, qui tient le coup... Quand on est un écrivain reconnu internationalement et qu'on a plus de soixante-dix ans, quoi. Mais c'est oublier trop vite les désirs et les tourments  !

 

 Oh, bien sûr, celui qui a construit sa maison a bien le droit de sortir doucement, de s'asseoir sur le banc de pierre qu'il a installé voici trente ans sous la vigne, de regarder le vent agiter les peupliers bavards qu'il a plantés, et puis d'étirer ses jambes et de dire : "j'ai construit cette maison pour moi, pour mes amis et pour adoucir le peu de temps qui me reste". Mais c'est qu'il oublie le vent des tempêtes qui  décrochaient les ardoises du toit, les portes qui claquaient sous la colère, les doigts meurtris sous le marteau et le dos qui se courbait, et les pleurs qui coulaient... 

 

Je veux bien croire à la sincérité de Borges, parce qu'il a construit une solide maison. Mas si cette dernière n'avait pas tenu le coup ? Il a intitulé son livre de nouvelles : "le livre de sable" - c'est facile, me suis-je dit avec amertume, un titre pareil, quand votre oeuvre est- déjà -   gravée dans le marbre... J'en accusais presque Borges de coquetterie. 

 

Et puis je me suis calmée, parce qu'après tout, c'est Borgès qui a raison, et pas moi, bien sûr.

Et puis,  suis-je si  éloignée de lui ?  En toute sincérité,  "l'élite" et "la Masse", le succès, quoi, sous quelque forme que ce soit, je crois que je saurais m'en passer. En tout cas, je m'entraîne fermement à m'en passer, ahaha.

 

Mais alors, que pourrais-je déclarer, depuis ce blog minuscule, qui est comme une petite fenêtre, tout juste entrouverte, si je veux parler comme le vieux Borges ? 

 

"J'écris pour moi.


Ca, c'est sûr et certain. C'est même pour me sauver, d'une certaine manière, que j'ai commencé. Donc, hop, ce bout-là dans ma besace. 


"Pour mes amis."


Aïe.

Je ne suis pas sûre du tout de cette partie-là. J'écris pour un autre, je suis d'accord. Mais est-il un ami ? Et, si j'ai des amis, ce ne sont pas mes textes que je leur donne, me semble-t-il...

Alors, pour qui ? 

 Il me semble que  j'écris pour une sorte d'inconnu, qui me ressemblerait fortement, dont je procèderais en quelque sorte, et qui tendrait l'oreille. Qui devrait absolument tendre l'oreille, et ceci n'est pas qu'une figure de rhétorique - seuls mes frères et soeurs pourraient comprendre d'instinct ce que je veux dire exactement  par là ... Chanter aurait été sans doute plus facile, mais je chante faux. Alors ! 

 

"et pour adoucir le temps"


Ouille.


"je chante pour passer le temps

Petit qu'il me reste de vivre", disait lui aussi Aragon.

 

Il faut être très âgé pour sentir cela, me semble-t-il, je n'en suis pas encore là, pas encore ! Non, je ne peux honnêtement pas retenir ce bout-là non plus. 

Donc, il ne  reste que : "j'écris pour moi". 

Quel orgueil ! Quelle foutue vanité !! Et quelle inutilité...

D'autant que le vent souffle, les portes claquent, et les larmes coulent !

Non, ce n'est pas ça non plus. Tentons autre chose :

" J'écris pour me consoler d'être moi, et on est prié de tendre l'oreille".  

Ca correspond déjà mieux, pas vrai ? 

 

 

 

 

 

 

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31 août 2012 5 31 /08 /août /2012 09:45

L'émission sur Claude Levi Strauss, l'autre soir sur Arte :

 

http://videos.arte.tv/fr/videos/claude_levi_strauss-6883692.html

 

 

était une telle merveille d'intelligence que je ne cesse d'y repenser. D'une manière formelle, elle allait à contrepied de la tendance actuelle, qui rend fort présents les intervieweurs dans les documentaires - non seulement ils sont présentés à l'écran visuellement, mais encore leur personnalité est évoquée. Ce n'est d'ailleurs pas si désagréable, quand il s'agit de reportages ou de documentaires sur des sujets scientifiques ou de société - le spectateur s'identifie plus facilement à ces "Candide" ; mais  cela tourne à l'insupportable quand le sujet de l'émission dépasse l'expérience commune pour aborder des thèmes majeurs de réflexion.

 

En ce sens, l'émission sur Levi Strauss qui réduisait à néant l'interlocuteur, l'intervieweur  du penseur (les questions et les citations relevées étaient présentées sur des panneaux, comme dans les premiers films muets) permettait au spectateur de ne pas être troublé par autre chose que la parole émise par le sociologue.

 

De cette simplicité biblique jaillissait la lumière...

 

Mais ce qui m'a le plus frappée, c'est bien évidemment la toute dernière partie de l'interview, quand Levi-Strauss, interrogé sur ce qui lui déplaisait le plus  dans son épqoue, évoque la vitesse toujours plus accrue des informations échangées, pour déplorer ce qu'il nomme une "boulimie consommatrice"  des échanges, photos, courriers etc. 

 

Cet homme nous dit cela en 1972 ! Vous vous rendez compte ? Et j'en parle aujourd'hui, grâce à l'outil technique qui permet justement de réaliser ce que craignait et analysait le plus brillamment, et de la manière la plus émouvante qui soit, Levi Strauss : ce n'est plus de l'intuition, c'est carrément une intelligence visionnaire...

 

 

(le passage sur l'humanisme sartrien n'est pas piqué des hannetons non plus, notez).

 

Bref, cela faisait si longtemps que la télé n'avait pas sollicité mon pauvre cerveau (mais, tout pauvre soit-il, tant pis : je le possède, j'essaie donc de m'en servir), que je voudrais la remercier de ce cadeau inattendu. Et que je vais me garder précieusement cette émission-là, histoire d'y puiser les arguments qui me manquent tant, quand je veux tenter de définir ce qui me gêne le plus dans ce monde que je crois mien, alors qu'en réalité, bien entendu, je ne fais que lui appartenir ! 

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9 août 2012 4 09 /08 /août /2012 10:52

Continuons l'anecdote ! 

 

Polac se demandait, dans sa lettre, si je ne devais pas  modifier  ceci, ou cela, de mon petit texte,  puis poursuivait : "non, finalement, ne changez rien, mais armez-vous de patience. Je vous prédis qu'il vous sera presque impossible de vous faire éditer, et pas seulement parce que votre texte est une nouvelle... Je ne vois, pour une écriture comme la vôtre, qu'une maison d'édition "parallèle", un endroit où l'on ne suit pas le courant commun, où l'on prend des risques. Tentez donc votre chance au "Dilettante" (il joignait l'adresse de cet éditeur  totalement inconnu de moi) et finissait : " je ne vois guère qu'une maison comme cela pour vous".

 

J'ai donc, après avoir bien reniflé, pris mon courage à deux mains et envoyé mon texte au Dilettante. Dans la lettre d'accompagnement, je m'étais posée la question : fallait-il que je me réclame du courrier de Polac ? Celui-ci m'avait donné un conseil, ce n'était pas, à mes yeux, comme une "recommandation" : je décidai donc de ne souffler mot du conseil reçu, ni du nom "célèbre" qui me l'avait donné, et de simplement proposer mon petit texte, sans autre forme de procès. 

 

Et je me mis à attendre... 

 

Ah bien ouiche !!! 

 

La toute première lettre de refus d'éditeur que je reçus, venant donc du "Dilettante", ne fut pas piquée des hannetons (qui sont d'ailleurs, les pauvres, en voie de disparition, mais passons.). J'aurais normalement dû recevoir une de ces formules stéréotypées, où l'on vous informe poliment, par en-dessus,  que la ligne éditoriale de la maison n'est pas compatible etc., pour vous faire comprendre, par en-dessous, que les stages de macramé aussi ça peut être épanouissant. 

 

Mais je n'ai eu droit qu'à un mot manuscrit, d'une gande écriture d'autant plus sèche qu'elle était en colère, aurait-on dit, et qui me  rejetait  si violemment que j'en eus le souffle coupé : le tout en  dix lignes, dont deux questions. La première était "comment avais-je bien pu avoir eu vent de l'adresse et de l'existence des  éditions du Dilettante ? La seconde poursuivait : "Parce que, si vraiment n'importe qui, sorti d'on ne sait où,  se permettait d'envoyer des insanités pareilles, franchement, que fallait-il donc faire, où se cacher,  pour être un peu préservé de telles calamités, grands dieux  ?"

Une fois l'indignation ainsi exprimée, l'éditrice du Dilettante  continuait en disant "votre code postal est "76440" : si jamais vous vouliez néanmoins poursuivre dans  votre - euh- "projet", je vous renvoie à l'annuaire des éditeurs de province (elle m'en donnait la référence). Sait-on jamais ? Certains de nos confrères pourraient néanmoins, en cas de besoin, faire affaire avec vous. Mais je vous en prie : oubliez-nous, nous n'avons pas de temps à perdre ainsi !"

 

D'habitude, je suis plutôt bonne fille. Mais là... J'ai sauté sur mon azerty et j'ai composé une sorte de fort courte réplique (pour ne pas faire perdre plus de temps à des gens si occupés), où je soulignais à ma correspondante qu'elle avait commis l'exploit de mépriser, en dix lignes seulement,  un maximum de   personnes humaines : moi-même, évidemment, (mais sans doute, si on l'en croyait, méritais-je à peine le qualificatif de "personne humaine"), Michel Polac, qui était celui qui m'avait adressée à elle, et ces " éditeurs provinciaux", qu'elle n'hésitait pas à désigner  comme pouvant éventuellement ramasser les rebuts dégoûtants débordant  des poubelles du Dilettante, ce qui prouvait l'estime qu'elle portait  à ces confrères-  que je ne solliciterais donc pour rien au monde, non mais !  Je finissais mon courrier (j'avais reçu le sien un 23 décembre) par un "et joyeux noël à vous aussi", qui cachait bien évidemment le souhait que la bûche soit immangeable,  le foie gras bourré de cholestérol, et qu'elle s'étrangle en avalant sa bourriche d'huîtres. 

 

Je croyais m'être ainsi réparée, et débarrassée de la cuistrerie parisienne. D'une certaine manière, oui, je l'étais. Mais d'une autre... Les milliers d'apprentis écrivains, la masse phénoménale de ceux qui ressentent le besoin de s'exprimer et que le manqe de talent, ou la malchance, ou la simple vie, empêchent de réussir, vont parfaitement comprendre que les nuits qui ont suivi l'anecdote ont été, dirons-nous, assez mauvaises. 

 

Il est difficile de résister au mépris, même quand celui ou celle qui vous le marque est lui-même méprisable. 

 

Et si n'importe quel scribouilleur du dimanche a le droit à la dignité, ce que semblait si évidemment ignorer l'éditrice du Dilettante, c'est  qu'il est en réalité sincère - et nous tous, les petits, les sans-grade, les "ni lus ni connus", partageons au moins cette qualité-là, la sincérité, si nécessaire à la recherche de la vérité d'une écriture...

 

 Mais les gens sincères sont généralement fort peu crus des menteurs professionnels. Pas vrai ? 

 


 


 

 

 

 

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8 août 2012 3 08 /08 /août /2012 09:00

Il y avait eu les émissions de Polac à la télé, et puis ses chroniques dans Charlie Hebdo - je le considérais un peu comme un grand'père - normal, quand on n'a jamais eu de grand'père, on s'en fabrique avec ce dont on dispose, pas vrai ? 

Vu que c'était "mon" grand'père donc, avec bouille ronde, cheveux blancs, et lunettes sur le bout du nez, soit tous les attributs de la bienveillance,  et qu'il était beaucoup moins intimidant qu'un Pivot ou (pire encore !) qu'un Sollers, quand j'ai eu fini, "suang" (= sang et eau) mon tout premier texte,  je ne savais littéralement  pas quoi en faire. Alors, je le lui ai envoyé. Ca s'inscrivait dans la grande tradition "envoi aux grands aînés", ça ne mangeait pas de pain et puis comme ça : "je serais fixée". 

Le problème de la valeur m'avait tracassée pendant des années : le passage à l'acte, ici au texte, m'avait permis de le dépasser, mais néanmoins, n'écrire que pour  entasser des feuilles dans le tiroir de mon bureau était certes envisageable mais manquait un peu de piment. J'étais bien trop peu sûre de moi pour  entamer quoi que ce soit d'autre (par exemple, proposer des textes à un éditeur ?) sans encouragements. D'un autre côté, le tiroir en question était bien profond. Pas bien sûre de le remplir non plus...

Une fois le texte parti avec la lettre idoine, je m'étais sentie soulagée. Que c'est bon, de s'être déchargée sur un autre d'une décision qui vous revient à vous seule ! Libérée, j'avais continué à vaquer à mes occupations. Cette année-là, Clopin remplaçait la corde de la balançoire dans le jardin, Clopinou rentrait en CP avec une maîtresse qui "n'aimait pas les garçons", je venais de trouver un travail près de ma nouvelle maison, bref, j'étais occupée et légère comme une feuille au vent. Et je regardais Polac, à la télé, en me disant que, ça se trouve, il avait opéré un classement vertical et radical de mon modeste courrier. Mais cela faisait tout de même un petit lien entre lui et moi.

 

Et puis sa lettre est arrivée. J'ai couru au fond du jardin, je me suis installée sur la balançoire et j'ai commencé, mais évidemment je n'ai pas bien vu  la seconde phrase, parce que la première m'avait tellement embué les yeux :

 

"Vous êtes un écrivain, et si vous ne le savez pas, je vous le confirme". 

 

C'était ça, sa première phrase. 

 

Je ne sais pas si Michel Polac a jamais eu des enfants, et des petits-enfants. Mais en tout cas, et même si je n'en suis pas digne, je suis à jamais sa petite fille. Avec, comme aujourd'hui, des yeux une fois de plus tout embués. 

 

 

 

 

 

 

 

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