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25 novembre 2011 5 25 /11 /novembre /2011 10:37

Bon, ben j'échoue dans toutes  mes petites tentatives littéraires, dirait-on,  en ce moment. "Même pas mal", me persuadé-je en haussant les épaules, "parce que j'aurai toujours le recours des livres"...  Dire que je me répète ça depuis mes 17 ans... soupir ! 

 

Je rate vraiment tout ce que j'entreprends - Clopinou me demande d'acheter les Bucoliques, je reviens avec l'Enéide, que l'infernal garnement  dépose gentiment sur mon oreiller, histoire de me dire que ce ne sera certes pas lui qui va lire ça...

 

"Même pas mal". Je m'empare du livre, c'est infernal à lire car il y a environ une note par phrase, qu'il faut courir à la fin du bouquin pour en avoir l'explication, et que j'en suis à la note 376 qui me dit d'aller voir la note 248 qui, je vous jure que c'est vrai sur la tête de mon chien d'abord, me renvoie à la note 36 (que j'avais déjà lue, of course). 

 

"Même pas mal". J'arrive, avec un gros effort, à NE PAS en vouloir au directeur de publication - seulement j'aimerais bien qu'on se souvienne que je suis légèrement paranoïaque, et que ce n'est pas avec des coups comme ça qu'on va m'arranger le modèle. 

 

Je dois absolument penser à autre chose. Parce que si je me mets à croire que les bouquins me font la gueule, et que je n'ai vraiment rien à faire, (et surtout pas écrire) dans cet univers-là, il  me reste quoi, hmmm ? 

 

Ah, si j'étais un mouton, je suis sûre que j'aurais une tête noire, parmi les têtes blanches... 

 

Parce qu'à force de même pas mal, je m'en vais avoir quelques bleus à l'âme, moi... 

 

 

 

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24 novembre 2011 4 24 /11 /novembre /2011 16:56

  Parfois, un  regard interloqué, un index vrillé  à une tempe, derrière mon dos, me confirment que  certains  se demandent sérieusement  si j'ai une araignée au plafond.

 S'ils savaient...

 Car ils ont raison, bien entendu. Mais voilà, seuls ceux qui en ont le savent : les araignées du plafond tissent uniquement des étoiles. 

 

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10 novembre 2011 4 10 /11 /novembre /2011 11:36

Bellérophon chevauchant Pégase éprouvait toute l’ivresse de la liberté infinie : les ennemis vaincus, la chaleur des muscles de l’animal dompté entre ses jambes, le battement des ailes rythmant le ciel entier où se mouvoir, comme de l’eau dans de l’eau. Et c’est sans doute à ce moment précis, où son cœur s’abandonnait à l’orgueil de la force  magique, animale, où sa confiance en lui était la plus absolue, qu’il courait le plus grand danger. : le rire triomphant de l’homme a toujours agacé les dieux.

 

Les mythes sont ainsi faits, qu’ils dévoilent le fil de nos vies –  funambule rime avec somnambule, et  la plus aérienne des rêveuses endormies chutera le plus lourdement.

 

 

 

 

 

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7 novembre 2011 1 07 /11 /novembre /2011 08:41

Comme chaque année, novembre indique notre entrée dans les "mois noirs"; un peu éclairés par l'anniversaire de Clopin, certes - mais je me méfie toujours du danger à choisir des cadeaux non pour celui à qui l'on veut faire plaisir, mais en réalité, plus profondément, à soi-même. J'ai résisté à l'envie de lui offrir du parfum, ou des livres qui ne l'auraient pas forcément intéressé. Il m'avait indiqué "gitans et tsiganes", avec photos en noir et blanc. J'ai juste brodé là autour...

 

J'espère que cette semaine va être fructueuse, ce qui signifie, chez moi, pouvoir partager mon temps entre l'écriture, la lecture et quelques bonnes conversations, le tout sur fond de surprises musicales et en slalomant entre les tâches quotidiennes. Hélas, rien n'est moins sûr : même  ma visite quotidienne  chez Eric Chevillard me laisse sur ma faim depuis deux jours, ce qui est rare... Quant au morceau de Keith Jarret de ce matin, capté sur France Mu, il m'a profondément navrée : ce "Rio" (au moins le petit bout que j'en ai entendu) n'est que du sous-Chopin. Déjà que je n'aime pas ce dernier... 

 

Chez Onfray, une chronique qui aurait pu être résumée en deux phrases est  délayée en cinq paragraphes. C'est d'un pâteux...

 

Chez Assouline, on parle de Chateaubriand. Pfff ! Vous avouerez...

 

Bon, le pressentiment se confirme :  ce sera donc une semaine de la tartine. 

 

Allez  donc légèrement vous poser  sur un texte quelconque ( les  "dix lignes de madeleine" proposés par les éditions omnibus via le baiser de la matrice, par exemple), en étant ainsi  engluée  dès le lundi matin dans la margarine, vous ? 

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1 novembre 2011 2 01 /11 /novembre /2011 11:25

J'ai fini la lecture du "Proust" de Samuel Beckett avec des sentiments mélangés. 

 

IL faut savoir que j'ai beaucoup admiré Beckett, non seulement à cause de l'immortel "en attendant Godot", mais surtout à cause de ses livres. Je les jugeais... profonds et désinvoltes à la fois. Oui, désinvoltes. Je me souviens (je n'ai pas l'envie de chercher les références exactes, alors, ce ne seront que des souvenirs approximatifs) d'un début de chapitre, était-ce dans Watt ? Dans Murphy ? Toujours est-il que c'était l'apparition de l'héroïne. Elle débarquait dans le roman, décrite ainsi :

 

"sexe  féminin

taille 1 m 73

yeux bleus

pointure 38

taille 62 cm

poitrine 90

hanches 95

robe en cotonnade bleue

 

Le sexe féminin, la taille, les yeux et le reste entrèrent dans le magasin X en faisant gaiement claquer la porte..." (ou un truc approchant)

 

 J'avais trouvé ça vraiment très drôle, culotté et désinvolte, donc. Pas autant qu'Alexandre Dumas, qui  n'hésitait pas à nommer un chapitre de sa Dame de Montsoreau ainsi : 

"LXXVI

Lequel n'est autre chose que la suite du précédent, écourté par l'auteur pour cause de fin d'année"

 

Mais épatant tout de même. Je m'attendais donc à une désinvolture identique, dans ce mince petit livre (106 pages et demie écrites gros, aux édtions de minuit) traitant de l'océan de la Recherche du Temps Perdu. Cette minceur même m'en apparaissait le signe...

 

Eh bien, pas du tout. Ce livre est tout, sauf désinvolte. Ce n'est pas une "critique littéraire", à proprement parler. Plutôt une sorte de "résumé analytique" - et en fait, toutes proportions gardées évidemment, Beckett fait ici ce que chaque lecteur de la Recherche a envie de faire : décrire sa propre lecture. 

 

En plus, Beckett n'a que 24 ans quand il écrit ce livre. On le sent à la fois armé d'érudition (Vico, Joyce et Dante n'ont plus de secrets pour lui, et il en fera référence en parlant de Proust, au risque de "grands écarts" un peu alambiqués), possédant les clefs du savoir et de l'analyse, et impatient de s'en servir. J'avais presque envie de lui dire, tout en le lisant avec avidité, de ralentir un peu. Il ne sait pas encore, visiblement, que ces merveilleux outils de compréhension dont il dispose, le savoir et l'intelligence de l'analyse, ne sont rien, s'iis ne sont pas mis au service de l'émotion. Il est tellement content de comprendre Proust, de pouvoir en rendre compte, qu'il en oublie de nous dire l'effet produit sur ses propres nerfs, sur sa propre sensibilité. Or, tous les lecteurs de Proust savent bien que c'est là le point d'achoppement. Il est si facile de se perdre dans d'infinies analyses, dans du décryptage, dans tous les paradigmes proustiens qui s'offrent au cerveau comme des corolles déployées - on en oublierait presque d'admirer le chemin. 

Et notre jeune Beckett est tombé dans le piège, j'en ai bien peur. D'autant qu'il fait comme tous les autres, (sauf peut-être les fous absolus genre Tadié ?) : il est devant l'oeuvre de Proust comme devant une toile monumentale, plongée dans l'obscurité d'un musée endormi. Ceux qui viennent la voir portent leur propre lumière, comme les mineurs ont une lampe sur leurs casques. Le faisceau de la lampe rencontre tel ou tel partie du tableau, l'éclaire, certes, mais laisse toujours d'autres parties dans l'ombre. Ainsi, pas un mot, dans le Proust de Beckett, sur les juifs, si cruellement moqués dans le livre, comme si Proust cherchait à éloifner ainsi son propre judaïsme. Presque rien sur l'homosexualité, à peine indiquée quand Beckett parle de Charlus, alors qu'il est le prototype de ce que Marcel redoute tant d'être. Bien sûr, Beckett a capté l'essentiel de la Recherche, et il le livre ici, avec la profondeur requise. Mais ! 

En plus, ce qui n'est pas pour me déplaire, il partage certaines de mes propres opinions, simplement bien plus poussées, bien plus achevées que les miennes, et dites avec tant de clarté et d'élégance que je ne peux qu'admirer, et me sentir bien petite. Mais quand il déclare "il est significatif que les images de Proust sont pour la plupart botaniques. il compare l'humain au végétal. L'humanité lui semble être une flore, jamais une faune : aucun chat noir, aucun chien fidèle chez Proust", non seulement je l'approuve des deux mains, mais j'ai envie, là encore, de lui parler, pour compléter son propos. Car pour moi, la botanique relevée par Beckett éclate aussi dans la phrase proustienne, qui est elle-même comme une tige rhizomée dont Proust se sert pour entourer son lecteur et faire réapparaître, en résurgence, chacun de ses personnages. Beckett a bien noté, aussi, que le grain de beauté d'Albertine voyage de son menton à sa lèvre supérieure, mais il n'a pas relevé, d'après moi, la complexité des portraits féminins de Marcel. Les trois femmes de pouvoir, dans le livre, à savoir Mme de Guermantes, Mme Verdurin et  Françoise, échappent à la maternité. Certes, Françoise a une nièce qui deviendra "sa fille" à Paris - mais point de maternage, point de petite enfance. Par contre, Beckett a  raison, selon moi de rejeter le titre du "temps retrouvé" : comme lui, je pense qu'on pourrait l'appeler plus commodément "le temps aboli".  On pourrait multiplier à l'infini les opinions de Beckett sur Proust, et les discuter toutes,  mais encore une fois, il fait comme tout le monde : il projette son faisceau de lumière à lui sur une oeuvre aussi grande, habitée et foisonnante qu'un tableau de Bosch. Imaginez donc de voir "le jardin des délices" à la lueur d'une bougie. C'est ce que nous faisons tous avec la Recherche, en fait ; ça ne m'a pas empêchée, pendant tout le bouquin de Beckett, d'avoir une furieuse envie de lui parler, d'entamer une bonne conversation sur notre Marcel commun...

 

Et si nous décidons de "balayer" l'oeuvre, comme Assouline le fait avec son " Proust de A à Z", nous n'en aurons pas plus saisi l'amplitude. Le balayage ne permettant pas, à mon sens, l'exploration minutieuse de cet univers-là. Les minuscules lectures de Véronique Aubouy sont peut-être ce qui se rapproche de plus de ce que chacun d'entre nous peut transmettre de cette oeuvre-là...

 

En tout cas, tout incomplet soit-il, le livre de Beckett fait preuve d'une remarquable pénétration de la Recherche; Mais il cadre si peu avec ce que je croyais savoir de Samuel - il est si sérieux, si empreint d'érudition et d'analyse, qu'il en devient presque, non pas scolaire mais universitaire. Je suis persuadée, vraiment, que Beckett rendant compte de sa lecture de Proust aurait écrit un tout autre livre, si, au lieu de s'y lancer à 24 ans seulement, il l'avait écrit à la fin de sa vie. 

 

Beckett était un si magnifique vieil homme. J'ai comparé un jour ses rides aux sillons de sable que la mer laisse sur l'estran, quand elle se retire. Il lui a donc manqué, quand il faisait jouer avec ivresse ses nouveaux outils de compréhension sur Proust, paradoxalement, le sens de toute la Recherche : à savoir qu'il faut  avoir commencé d'éprouver sur soi-même le  Temps, encore et encore, pour parler de ce livre-là. 

 

Tel quel, le livre est cependant vraiment intéressant, et je le recommande !! C'est juste qu'on a tant envie de dire, une fois la dernière page refermée : "play it again, Sam"...

 

 

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29 octobre 2011 6 29 /10 /octobre /2011 13:41

Coïncidences, coïncidences...

Une amie m'offre, hier au soir, un mince livre : "Proust", par Samuel Beckett. J'ignorais absolument que Beckett, âgé alors de 24 ans, avait écrit sur Proust. Voir ces deux noms, si importants pour moi, associés sur la même jaquette, m'a fait carrément frissonner. Je retarde le moment d'ouvrir ce précieux petit livre, parce que je sais que je ne ferai plus  rien d'autre, une fois ouvert,  avant de l'avoir terminé.

 

Ce matin, un mail dans le fatras habituel des offres de la Redoute, d'horoscope gratuit et de propositions d'achats divers, que je reçois journellement  sans trop bien savoir comment j'en suis arrivée là. J'ai failli passer sans le voir, or c'est très intéressant. Véronique Aubouy, l'amie cinéaste qui consacre sa vie à filmer des lecteurs de Proust, lance une sorte de jeu-concours via son site "le Baiser de la Matrice"  avec, à la clé, le dernier livre de Pierre Assouline, "Proust de A à Z". Le jeu est drôle et difficile, mais la conjonction de ces trois noms, Proust, Aubouy et Assouline, m'a laissée carrément pantoise. Je savais bien que les deux derniers se connaissaient, mais voir ainsi leurs noms associés... (et si vous suivez le lien, vous pouvez participer).

 

Du coup, (et cette expression est précisément celle qui convient, en l'occurrence), je file chez Assouline relayer auprès des visiteurs l'initiative de Véronique. Comme d'hab', je me fais avoir : je lis le billet, je saupoudre de mon grain de sel, bref, j'éveille les trolls et me voici partie pour un énième tour de cabriole pour la galerie... Sauf que, lassée de ma propre capacité à gaspiller ainsi mon temps, je décide d'écouter, en même temps que je "dialogue" avec les zozos assouliniens, France Culture. D'habitude, je ne peux pas, parce que Clopin a du mal à supporter la radio le matin. Mais justement : il est absent, parti à Paris aujourd'hui. Je peux monter le volume tant que je veux...  Et là, j'entends que samedi prochain, entre 10 et 11 h, Pierre Assouline sera invité par son pote jean-Noël Jeanneney, pour présenter son "Proust de A à Z".

 

... 

 

Bon, je crois que j'ai compris. Je m'en vais consulter mon horoscope gratuit, tiens. S'il ne m'annonce pas qu'aujourd'hui, je vais  avoir à faire avec  un certain Marcel, ce sera la preuve que les horoscopes, c'est de la daube... 

 

(et un petit Brassens pour la route, tiens. Georges, tu me manques...)

 


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28 octobre 2011 5 28 /10 /octobre /2011 11:44

J'habite une maison qui est une demeure entourée, vivante et ouverte à autrui, surtout grâce aux multiples activités de Clopin, ce qui me convient parfaitement. Je ne saurais concevoir une maison autrement. Mais parfois, c'en est un peu trop. Nous sommes en période d'abattage, et donc de distribution, de nos moutons (100 % bios, élevés à la douce, tués dans le respect et fort proprement emballés dans des torchons blancs et de transparents sacs de congélation). Mais du coup, la maison ne vit plus : elle bruisse, les portes s'ouvrent et se referment à un rythme plus que soutenu, Clopin, déjà nerveux de nature, se démultiplie et je  tombe sur des copains , au détour d'un couloir, depuis le matin jusqu'au soir... Je m'accroche d'autant plus fermement à mes livres, mes petites écritures et mes balades sur le net - je me sens plus que jamais double, Janusienne, schyzophrène et écartelée, car je pourrais parfaitement vivre - aussi -  dans une grande solitude. 

 

Heureusement, Doris, je veux dire Doris Lessing, est là. J'ai déjà lu pas mal de ses livres il y a quelques années, et je renouvelle ce cycle - ça me permet de conforter mes premières impressions, à savoir que cette femme-là, les deux pieds dans le réel, témoin de son temps et d'une force que j'envie, est une des plus formidables romancières que je connaisse. Romancière, hein, et non pas styliste à la manière d'une Woolf, ou artiste lyrique comme Duras (si j'ose dire, pour aller vite..). Et elle me fait penser au jeune Stoni

 

Quand une de ses héroïnes s'écrie : "Le monde littéraire est si prétentieux, si frelaté, si fermé ou, vu du côté commercial, si puant, que le moindre contact avec lui me donne envie d'adhérer au Parti Communiste", j'ai envie de pousser Stoni du coude. Plus de cinquante ans (le "Carnet d'Or" est sensé se passer dans les années 1950) séparent Doris de Stoni, et pourtant, je retrouve chez l'une comme chez l'autre les mêmes préoccupations, la même ironie légèrement désespérée, et la même raideur honnête. Je n'ai jamais lu, ou bien par hasard et sans le reconnaître,  de livre de Stoni : il s'avance avec un sac en papier sur la tête, pour avoir la liberté de dénigrer tout son soûl son salopard d'éditeur. On comprend bien que ce dernier est un loup, non pas déguisé en mouton, mais, ce qui est bien pire, déguisé en berger... 

 

Ce qui me ramène tout droit à mes moutons, à savoir qu'il y a comme cela des sortes d'affinités entre des êtres les plus différents possibles. Mais j'aime bien ce catapultage entre une romancière de langue  anglaise profondément hétérosexuelle, si j'ose dire, qui a été engluée jusqu'au cou dans les idéologies de son époque (*), et un jeune romancier communiste, (en 2011 !!!), gay et parisien. 

 

On aurait pu croire, pourtant, que Stoni avait plus de point communs avec "Jacky", une autre plume parisienne et gay, que j'ai rencontré non sur son blog (à ma connaissance, il n'en a pas), mais chez Assouline, et qui signe de jolies petites compilations de textes littéraires, dédiées à des thèmes ("le goût des jardins", "le goût du rêve", et sa plus belle réussite, à mon avis, un "goût du cinéma" qui comprenait précisément des textes que j'aurais moi-même choisis...).

 

 

 

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Mais en fait, il n'y a rien de commun entre Jacky et Stoni, même pas, à mon sens, leur orientation sexuelle. Jacky, plus âgé, est d'habitude bienveillant, bon camarade et conciliant. Mais parfois, comme la langue bifide d'un serpent surgit et se rétracte, il vous envoie, zwwwiiiip, une méchanceté gratuite, une grossièreté calculée, une mauvaise réflexion qui vous pique d'autant plus que vous n'avez rien vu venir. Je mets cette particularité sur le compte d'une homosexualité qui, jusqu'à ces toutes dernières années, impliquait une telle souffrance sociale qu'il fallait bien s'en défendre. D'où l'ophidienne et déroutante méchanceté "spontanée" de Jacky, qui le fait ressembler, l'espace d'une seconde, à ces vieilles bigotes malveillantes qui vous suivent du regard dans la rue. Rien de tout cela chez le jeune Stoni (il n'a pas trente ans), qui vit, me semble-t-il, son homosexualité de manière beaucoup plus bienveillante, et qui concentre sa colère sur les injustices sociales contre lesquelles il se bat... Il me semble donc que l'homosexualité même a changé, non de "nature", mais de forme sur ceux qu'elle concerne, et dans le bon sens. Enfin, ce que j'en dis...

 

Je me rends compte que je divague, là, sur des personnes rencontrées exclusivement sur le Net, c'est-à-dire à moitié réelles seulement. Mais bon, n'agit-on pas exactement de même avec moi ? 

 

Et puis, c'est plus fort que moi, je n'arrête pas de tout mélanger... Comme ce morceau découvert hier sur France Mu, et qui me ravit l'oreille depuis. 

Et j'arrête là, car j'entends bêler mon nom... J'arrive, bon sang de bonsoir, j'arrive... 

 

QUATUOR EBENE

 

 

 

ps : par ailleurs, Doris Lessing est prix Nobel de littérature. M'enfin, bon, les prix...

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24 octobre 2011 1 24 /10 /octobre /2011 10:21

Il n'est guère difficile de transormer une simple réunion de famille en pugilat.  Les familles, Gide l'a dit bien avant moi, et avec quelle force dans la formule ("familles, je vous hais"...) , sont des chaudrons accrochés dans de sombres cheminées. On peut y cuire des soupes réconfortantes, mais cela peut aussi virer au brouet de sorcière, en un rien de temps. Une parole blessante ici, une ignorance là, une maladresse, des positions dans la famille qui, du fait du mystérieux diktat familial, sont restées inchangées et imprégnées de rivalité tue : il ya certes beaucoup plus de motifs à ne plus se fréquenter, une fois le coeur de la famille disparu (chez nous, c'était la mère), que de persister. 

 

Je ne m'y risque donc qu'avec parcimonie, et prudence. De toute manière, "les autres" n'en attendent pas moins de moi : les cartes  sont distribuées de telle manière que je suis, de toute éternité, destinée à être singulière. Mais cette retenue est parfois déjouée : la toute simple  réunion de famille d'hier a été, pour moi, une petite perle rousse, à accrocher au milieu du collier de mes journées heureuses. 

 

Je pense qu'll y a eu une sorte conjonction temporelle, qui a permis cette belle journée rieuse.  J'entre en effet dans l'automne de ma vie, tout comme octobre est la sentinelle avancée des mois noirs à venir - et mes frères et soeurs ne me précèdent que d'une très courte tête. Une belle journée d'octobre, un clair soleil, du bleu au-dessus des maisons à pans de bois de Bernay, ma ville natale, voilà qui adoucit considérablement la sensation du temps qui passe.

 

Les maisons familiales de mon enfance ont été vendues, ne nous sont plus accessibles. Mais nous pouvons toujours retrouver le jardin public, associé, pour ma grande soeur et moi, à ces épouvantables 11 novembre qui nous voyaient debout, alignés par rangs d'âge, et subissant des discours de personnalités auxquels nous ne comprenions qu'une seule chose : c'est qu'il nous faudrait les écouter jusqu'au bout, dans le froid, parfois la pluie, et dans l'irrépréssible envie de retourner à la maison. Nous pouvons aussi marcher jusqu'au cimetière, où le caveau de famille étend sa simplissime plaque de granit gris (et tous sont d'accord pour reconnaître son "élégance". Peut-on ainsi être élégant, jusqu'après la mort ?) au-dessus des dépouilles de ceux partis avant nous. Nous pouvons reprendre le chemin noir et longer l'ancien Champ à Gonet. Rien que de prononcer les mots "rue Thiers, boulevard Dubus, lycée Augustin Fresnel" permettait, non pas d'abolir mais d'adoucir le temps passé. Comme si nos automnes saluaient nos défunts printemps...

 

Et Bernay, loin de qui nous avons tous vécu, a elle aussi  existé, dans l'entrefait, et n'a certes pas mal vieilli. Le patrimoine architectural de la  ville a même acquis de la valeur. J'avais peine à retrouver, dans la claire tour qui surmonte l'église Sainte-Croix, les traces de l'édifice dont je me souvenais : une sorte de pesant et fort sombre bâtiment noir, sans grâce particulière. La transformation de l'abbatiale rénovée est encore plus spectaculaire. Et dans le même temps, dans le jardin public, la rocaille rococo de mon enfance, avec la petite maison disneyenne qu'on aperçoit derrière le jet d'eau du bassin, a  fort heureusement  été préservée. Son mauvais goût patent m'est très cher, car j'y ai abrité, petite fille, le décor des contes de fée que je dévorais avec un bel appétit. 

 

Nous pouvions donc tous savourer cette étonnante réunion. Les lieux de notre enfance, que j'ai personnellement fuis dès que je l'ai pu, sont dorénavant bien plus aimables, plus accueillants, qu'ils ne l'ont jamais été. La petite ville rayonne d'un charme discret et calme, il y fait bon... Et l'eau du Cosnier est dorénavant claire et propre (je  m'en souvenais  comme une sorte d'égoût). Le soleil d'octobre, les jours passés, et nos retrouvailles familiales, s'inséraient à merveille dans ce décor à la fois chargé d'histoire (l'hôtel de la Gabelle, du 18è siècle, témoigne à lui seul des élégances passées) et si simple : une toute petite ville normande.  

 

J'ai vécu cette journée comme on mord dans une tartine de beurre. La gentillesse exquise d'une belle-soeur, l'énergie habituelle de ma grande soeur, la présence un peu bourrue de mon grand frère, et un grand gîte bien accueillant : ce n'était  pas le chaudron d'une sorcière qui était accroché à cette journée, mais l'alambic inattendu de la chimie familliale, avec son parfum d'enfance, son soleil d'octobre et nos automnes apaisés. 

 

 

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18 octobre 2011 2 18 /10 /octobre /2011 10:47

Je me suis une fois de plus endormie avant 22 h 30. Je n'ai donc pas vu "le procés Céline", sur Arte, et l'émission n'est pas (encore ?) visible sur le site. D'un autre côté, le terrain est déjà bien déblayé, LA question ontologique a déjà été posée des millions de fois (peut-on être une ordure ET un génie ?), on n'est pas près d'y apporter une réponse définitive,  et en plus, je préfère entendre lire Céline que le lire moi-même. Même par Lucchini ? Même. De toute façon, Michel Simon est mort, alors... fatu bien se résigner à Lucchini...

 

Je crois sincèrement que la lecture à haute voix de Céline est ce qui rend compte le mieux de sa réussite. A la simple lecture silencieuse, le travail se sent. A haute voix, toute trace de labeur s'efface.

 

Bon, vous n'êtes pas obligé de me croire, hein...

 

N'empêche, je me suis une fois de plus déçue, sur ce coup-là. Même pas capable de durer jusqu'à 22 heures trente... Je suis le rythme de mes poules ! (ah là là, dire qu'à vingt ans je te me vous enquillais trois nuits blanches de suite, avant de m'écrouler en tas...)

 

J'ai renoncé aussi à participer au concours lancé par France Musique. Il s'agit (je dis ça pour les ceusses qui seraient éventuellement tentés de) de choisir d'illustrer deux thèmes musicaux dans deux listes préparées d'avance,  par deux poèmes de 7 vers chacun, l'alexandrin étant toléré. 

Les deux listes proposées sont assez, comment dire ? conventionnelles ? M'enfin j'aurais pu retenir la Pavane de Fauré et une des musiques du film "la leçon de piano" : je crois, sans forfanterie,  connaître par coeur l'une et l'autre.  Pour une fois, cela aurait pu me servir...

 

Oui, mais en plus, en guise de punition sûrement, on nous impose 7 mots à caser dans chacune de nos compositions. Là encore, je pourrais faire avec : c'est un exercice oulipien fort banal. Sauf que chez Françoise Treussard, les mots retenus de manière presque aléatoire ouvrent l'imagination par la contrainte, certes, mais n'orientent pas l'exercice.

Ici, tout est fait pour accentuer le côté romantique des écrits demandés. Jugez plutôt : "rouge, deux, coeur, rien, espoir, portes, âme". Franchement ! Ca donne envie de secouer l'organisatrice du concours, et de lui dire que le succès du film de Campion (par exemple) est certes dû à son côté "romantique", puisqu'il paraphrase  la littérature anglo-saxonne féminine du 19è voire un peu avant : la leçon de piano sent son Austen, mais surtout, surtout sa Brontë, celle des Hauts de Hurlevent bien sûr : même exaspération des sentiments, même savante construction, même réalisme (oui oui je le prouve quand je veux d'abord), MAIS EN LE DEPASSANT ! Justement, le choix par Campion de NYman prouve bien sa volonté de ne pas se limiter à la paraphrase, à l'illustration cinématographique de ce courant romantique, mais d'accéder à l'intemporalité : c'était très astucieux de choisir un représentant de la musique répétitive. Si j'avais été Campion, j'aurais même été chercher Steve Reich, alors... 

Et là, paf, 7 mots qui sont comme autant de calendriers des PTT pour images de chatons. 

J'ai donc renoncé, non devant l'obstacle, mais devant  son  mauvais goût. Comme dans certaines maisons, où, à peine passé la porte, vous avez l'impression d'entrer dans les toilettes, tellement ces dernières illustrent le goût de leur propriétaire.   

 

Et puis, l'alexandrin... Pour illustrer  Fauré... Je ne sais pas vous, mais  moi ça me porterait plutôt sur le coeur...

 

Au lieu donc d'inventer deux danseurs de Pavane au coeur rouge, aux portes de l'âme largement ouvertes sur l'infini du rien mais gardant l'Espoir, je suis allée promener mon chien. C'était le temps qu'il fallait pour. Une pluie serrée, dense, un paysage qui bascule dans le pourrissement habituel de l'automne. Ca m'a fait penser aux dessins de jeunesse de Van Gogh, ces paysans se traînant dans des ornières ocres, ces arbres noirs et dépouillés, cet écrasement sous un ciel bas...

 

Heureusement que j'ai ma chaudière à pellet, dites donc... 

 

PS : bon, j'ai quand même envoyé une nouvelle à un concours (un autre). On verra bien ! 

 

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17 octobre 2011 1 17 /10 /octobre /2011 08:24

Lundi matin : en ce moment, sitôt après avoir conduit Clopinou au lycée, je me précipite sur le site "6mots" pour, futilement, y écrire des (toutes) petites phrasounettes. Ca me plaît bien, malgré les sévères-mais-justes reproches de Nicole Garreau, et je m'aperçois que j'y recours souvent aux animaux, comme pour le jeu de mot lacanien de ce matin. J'ai commis un " DSK, éléphant (du parti) qui trompe énormément (son épouse)" et mon préféré du jour reste "le zèbre ignore tout des carreaux", que je pourrais compléter d'un "zèbre ignorant tout des barreaux", voire d'un "Vergès : zèbre ignorant tout des barreaux" qui fermerait la boucle. 

 

Certes, ces amusettes me distraient de mes sages résolutions du mois dernier, mais ce ne sont que des détours, je reste  à peu près sur le droit chemin.  Je compte fermement m'atteler à deux ou trois concours de nouvelles, et j'ai entendu sur France Musique, en même temps que s'égrenaient les célèbres notes de la "Leçon de Piano" de Campion, (j'ai dû l'écouter à peu près cent fois, - que dis-je ! Mille e tre plutôt ! - , cette musique qui revisite absolument le romantisme, et est signée de Mychael Nyman... Hélas, elle est en train de tomber dans la publicité :  "tout le monde" la pille et l'emploie, or je suis assez égoïste pour avoir eu envie de la garder pour moi seule...),  j'ai entendu à la radio donc disais-je, une annonce de concours sur un thème qui, je pense, peut séduire n'importe quel amoureux des mots et de la musique. Je m'en vais aller regarder cela de plus près. 

 

Les autres délices promis cette semaine sont : ce soir, entre 18 et 19 heures, sur France Musique, la journalière émission de jazz (d'habitude excellente) qui nous offre, excusez du peu, "Galliano ET Nino Rota". Je ne vais rater ça pour rien au monde. Samedi prochain, ça fait loin mais nous y arriverons cependant, sur France Culture cette fois-ci, une émission consacrée à Véronique Aubouy et son "Proust Lu", le soir également. A vos postes ! 

 

A propos de poste, encore, j'ai écouté, toujours sur France Cul, une émission sur François Nourrissier, qui m'a laissée rêveuse. Je connaissais bien l'un des participants, Pierre Assouline, qui a rendu compte dans "Vies de Job" de ses visites à Nourrissier en fin de vie. Je ne connaissais pas du tout Teresa Cremisi. Et assez mal  l'oeuvre de Nourrissier.

 

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L'émission était passionnante, surtout parce qu'elle rendait compte d'une expérience d'écriture où, toutes proportions gardées évidemment, je me retrouvais absolument. Les mots de Nourrissier tombaient justes, résonnaient quoi, à mes oreilles. Et puis Madame Cremisi a commencé à établir des parallèles entre Nourrissier et Houellebecq. Tous deux se seraient connus, "reconnus", auraient échangés des propos et établis des liens. Pas seulement autour de leur amour commun des chiens. D'après Madame Cremisi, il y a chez les deux hommes des traits semblables : un commun désenchantement, un pesssimisme cynique, une haine de soi fondée sur un sentiment de laideur physique.  Madame Cremisi semblait très contente, ravie même, que Houellebecq "au moment du triomphe" (entendez : quand il a reçu le Goncourt), ait cité à trois ou quatre reprises le nom de Nourrissier. 

 

Je me suis demandée ce que Pierre Assouline, qui était l'ami de Nourrissier et ne porte guère dans son coeur Houellebecq, pensait de ce rapprochement entre les deux hommes. Sur la "République des Livres", il m'a répondu fermement qu'il ne voyait aucun rapport entre les deux écrivains, à part leur commun amour des chiens. Je n'en suis pas si sûre...

 

Je ne sais  si Pierre Assouline a entendu Madame Cremisi, mais bizarrement, je crois plus cette dernière, même si ses propos sont d'une éditrice baignant dans le marigot parisien et donc susceptibles d'être sous-tendus par des motifs tortueux (flatter Houellebecq, par exemple ? Bah, je dis ça je dis rien, et en plus je m'en fous alors !) 

 

En fait, je crois que Madame Cremisi a raison sur le pessimisme partagé  de Houellebecq et de Nourrissier, mais que ce pessimisme est également celui de Pierre Assouline. Enfin, pas vraiment le même, et c'est sans doute ce qui explique l'animosité palpable d'Assouline pour Houellebecq. Ces deux-là partagent la vie comme une  même rivière, d'après moi, une eau traître et glacée, pendant un "voyage d'hiver" schubertien, dirons-nous. . Mais justement : là où Houellebecq plonge dans la rivière, se complait à la trouver glauque et en rapporte, en ricanant, un témoignage acide sur son époque, Assouline ne la rêve que limpide : Il n'est que de lire les Vies de Job pour comprendre à quel point Assouline envisage l'existence comme une quête, en aveugle, d'une certaine lumiière voilée. Evidemment, cela ne peut guère "coller" entre eux deux. 

 

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Et ainsi tout le monde aurait raison. Madame Cremisi et Pierre Assouline, quoi. Il faudrait simplement considérer que François Nourrissier était à mi-chemin entre Houellebecq et Assouline, comme il pouvait apprécier tout à la fois Morand et Aragon... Après tout, n'avons-nous pas deux mains, qui peuvent s'écarter considérablement l'une de l'autre, et s'offrir ainsi à des êtres opposés, tout en appartenant au même et unique corps ? 

 

Quant à moi... Ah, je ne bois pas de cette eau-là, amère et froide, qui semble désaltérer tout ce monde. Mais elle m'attire pourtant... (mais je reviens bien vite auprès de ma chaudière à pellet !)

PS : j'ai épinglé au mur de ma chambre le portrait fascinant de Quignard, paru dans Libération, qui sort un livre "après Fukushima". C'est une photo dérangeante, oui, c'est cela, dérangeante. Mais sublime.

Je ne sais si je vais m'atteler à la lecture de ce dernier livre de Quignard - d'abord c'est difficile d'entrer dans cette écriture-là, ensuite on est ébloui par la virtuosité froide et belle de l'univers de Quignard, enfin je n'aime pas le Japon (mais Colette, si.).  Et je n'aime pas non plus  être "trop" éblouie. Mais c'est sans doute mon destin,  façon lapin dans les phares... 

 

ps : bon dieu, ce que je peux être décousue... Bah, ça vaut mieux que de porter une armure. 

 

 

 

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